Commémoration du jour de Achoura (partie III)

Commémorer le martyre de Karbala, est prescrit par la sharî'a de la divine intelligence


Depuis que le monde est monde, chaque fois qu'un être humain fait une action remarquable ou se distingue éminemment par quelque vertu, les autres hommes font en sorte que ce comportement puisse servir d'exemple édifiant et de modèle pour les générations futures.

Ces personnalités modèles et leurs actions exemplaires devinrent ainsi les parangons de récits religieux, mythiques ou légendaires, ou bien furent immortalisés par des arts tels que la poésie, des sciences telles que l'histoire et des pratiques telles que les diverses commémorations religieuses et civiles.

Corollairement, d'ailleurs, les hommes qui s'illustrèrent au contraire dans le mal et le vice furent aussi "immortalisés", non plus pour servir de modèle, mais pour servir de "repoussoir" au dégoût naturel qu'éprouve l'être humain envers le mal et l'imperfection.

Les jours de notre histoire et les lieux de notre planète sont ainsi ponctués de "jalons" temporels et géographiques qui sont autant de "repères" (shaeâ'ir) sur la voie de l'humanité parfaite, "repères" de la religion immuable de Dieu et de la divine nature humaine: tel jour ou tel endroit a vu tel acte de bravoure, tel autre jour ou lieu fut témoin de telle abnégation, tel troisième date ou terre fut marquée par tel acte de miséricorde… ou bien, au contraire, tel jour funeste ou tel endroit fut entaché par telle vilénie, telle trahison, telle fourberie…

Ces "repères de Dieu" (shaeâ'ir Allah) peuvent alors se trouver intégrés à des rites prescrits, comme c'est le cas pour les Djamârât que l'on doit lapider dans les rites du Hadj, par exemple, et qui ne sont autres que les lieux où le maudit Iblîs tenta Adam et Abraham et où ils le lapidèrent; ou encore pour les monts de Safâ' et Marwa dont le Coran énonce qu'ils font partie des "repères de Dieu" min shaeâ'ir Allah.

Cependant, la plupart de ces "repères" de l'humanité restent plus simplement des lieux et jours que la mémoire d'une portion plus ou moins grande de l'humanité commémore sans qu'aucun rite prescrit n'y soit attaché.

C'est par exemple le cas des lieux et jours de Badr et de Ohod, qui sont à jamais, pour l'un (Badr) le "repère" d'un comportement exemplaire suivi d'une réussite tout aussi exemplaire et, pour l'autre (Ohod), le "repère" d'un comportement exemplairement mauvais suivi de conséquences aussi exemplairement funestes.

Cette "vénération" (ta'zîm) des "repères" des perfections humaines est une prescription naturelle et fondamentale de cette intelligence dont Dieu a doté l'être humain et par laquelle il l'a distingué de l'animal, et en vertu de l'adéquation des prescriptions révélées et des prescriptions de cette divine intelligence placée en l'homme, le Coran confirme bien entendu cette pratique et la conforte avec insistance, disant comme on l'a vu:

" Rappelle-leur les Jours de Dieu: il y a en cela des signes pour tout [homme] plein de patience et de reconnaissance " (Cor. s.14v.5)
ou encore: “ Quant à qui vénère les repères de Dieu, cela relève en vérité de la vertu des cœurs ” (Cor. s.22v.32)

De même, selon la sharî'a de cette divine intelligence, l'importance du "repère" et de la vénération qu'il convient de lui accorder est tout naturellement fonction, d'une part de l'importance de la vertu illustrée ou du vice dénoncé, et d'autre part de l'intensité avec laquelle cette vertu ou ce vice se manifestent.

Or, comme on vient de le voir, il n'y eut depuis que le monde est monde aucun lieu autre que Karbala ni moment autre que 'Achoura où autant de vertus se manifestèrent de manière aussi concentrée et aussi intense en face d'autant d'iniquités avec autant d'intensité, ce qui fait que la commémoration du martyre de Karbala occupe dans la sharî'a de la divine intelligence et la sonna des gens doués de coeurs intelligents  une place absolument unique qu'aucun autre repère de Dieu ne saurait lui disputer.

Vénérer ce repère de Dieu relève donc par excellence de "la vertu des coeurs" et s'en abstenir consciemment (L'ignorant étant excusé), c'est trahir de manière patente l'inhumanité d'un coeur vide de toute intelligence.

*source: sibtayn.com