Croire à l'Imamat

Croire à l'Imamat

Nous croyons que l'Imamat est l'un des Principes fondamentaux de l'Islam(85) et que le Musulman ne saurait compléter sa Foi sans croire en ce Principe. A ce sujet, il n'est pas permis qu'un Musulman se contente de suivre ses ancêtres, ses proches parents ou ses éducateurs, même s'ils jouissent d'une haute position de notoriété et d'honorabilité, car il est obligatoire pour le Musulman d'établir sa croyance en l'Imamat par des arguments et le raisonnement, exactement comme il le fait pour le Monothéisme et la Prophétie.

Du moins, croire que tout Musulman ayant atteindre l'âge de la majorité légale a le devoir de s'acquitter de ses obligations religieuses, conduit nécessairement à croire à l'Imamat positivement ou négativement, en ce sens que si l'Imamat ne représente pas pour lui un Principe fondamental à propos duquel il n'a pas le droit de suivre un autre, s'agissant d'un Fondement ('açl) de la Religion, du moins doit-il croire en l'Imamat sous son autre aspect ou pour une autre raison, à savoir que le bon sens lui impose le devoir de s'acquitter de ses obligations religieuses correctement, c'est-à-dire de la manière qu'Allah nous a demandé de les exécuter; or, étant donné que nous n'avons pas de certitude absolue quant qu mode exact et originel de l'exécution de beaucoup d'entre elles, comme nous l'avons expliqué à la fin du chapitre précédent, nous devons nécessairement suivre, par acquit de conscience, quelqu'un qui assume la responsabilité de leur exactitude, en l'occurrence, l'Imam (infaillible) selon l'Ecole Imamite, ou un autre, selon les autres Ecoles.

De même, nous croyons que l'Imamat, est comme la Prophétie, une Grâce (lutf) d'Allah. Par conséquent, il y a nécessairement, à toute époque, un Imam guidant qui succède au Prophète dans les fonctions de guider et d'orienter les gens(86)vers la bonne Voie et la prospérité dans les deux mondes. Nous croyons aussi que l'Imam exerce la même autorité générale que le Prophète sur les gens(87), et qu'il a la charge de diriger leurs affaires, de conduire la Justice et d'éliminer l'injustice, l'oppression et la corruption qui séviraient dans leurs rangs.

C'est pourquoi l'Imamat est la continuation de la Prophétie, et la preuve de la nécessité de l'envoi de Mussagers et de Prophètes est la même pour succéder au Prophète.

Pour cette raison nous disons que l'Imam ne peut être désigné que par une Décret d'Allah communiqué par le Prophète ou par l'Imam précédent. L'Imamat ne peut pas être le résultat d'une élection ou d'un choix fait par les gens(88). Les gens ne peuvent pas nommer un Imam quand ils le désirent, et le destituer pour rester sans Imam quand ils le désirent car, comme l'a dit le Prophète: «Celui qui meurt sans connaître l'Imam de son époque sera mort en Jahilite»(89).

Par conséquent, il n'est pas possible qu'une époque de l'histoire soit sans un Imam à qui les gens ont l'obligationt d'obéir et ce, peu importe qu'ils l'acceptent ou le refusent, qu'ils le soutiennent ou non, qu'ils lui obéissent ou non, qu'il soit physiquement présent ou en occulation, car de même qu'il est admis que le Saint Prophète Mohammad était demeuré hors de la vue des gens dans la grotte de Thawr(90) ou dans le Chi`b(91) (le passage montagneux) d'Abî Tâlib, de même il est admissible que l'Imam disparaisse de la vue des gens peu importe, rationnellement, que son occulation soit longue ou brève.

Allah Tout-Puissant a dit dans le Saint Coran: «A chaque peuple un Guide est donné.» (Sourate al-Ra`d, 13:7) et «Il n'existe pas de communauté où ne soit passé un Avertisseur (pour la mettre en garde contre les conséquences de la désobéissance et de l'écart de la vérité)» (Sourate Fâtir, 35:24).

85. )L'Imamat est le quatrième Fondement de la Réligion chez les Chiites imamites. Il vient après la prophétie sur lequel de l'importance. On peut le considérer comme la base doctrinale qui distingue les Chiites imapites des autres Ecoles Juridiques musulmanes.

Etymologiquement, "imamat" en arabe désigne le fait que quelqu'un se met en avant pour que les gens le suivent et font ce qu'il fait ou l'imitent.

L'imam est donc "l'imité" (moqtadâ) et ceux qui l'imitent s'appelent "moqtadî" ou "ma'moum".

Le mot "imam" est mentionné 12 fois dans le Coran. Sept fois au singuilier : (Sourate al-Baqarah, 2:124; Sourate Houd, 11:17; Sourate al-Hijr, 15:79; Sourate al-Isrâ', 17:71; Sourate al-Forqân, 25:74; Sourtate Yassîn, 36:12; Sourate al-Ahqâf, 46:12) et cinq fois au pluriel: (Sourate al-Tawbah, 9:12; Sourate al-Anbiyâ', 21:73; Sourate al-Qiçaç, 28:41; Sourate al-Sajdah, 32:24).

Quant au sens technique du mot "imamat", c'est: la désignation divine de quelqu'un parmi les serviteurs pour ce poste, tout comme Allah choisit un prophète parmi eux. C'est Allah qui ordonne au Prophète d'indiquer à la Communauté des croyants l'Imam désigné par Lui (Allah) et de leur ordonner de le suivre. Les gens n'ont pas la latitude de choisir eux-mêmes leurs Imams car le Coran dit: «Ton Seigneur crée ce qu'IL veut et IL choisit; les gens n'ont pas à choisir.» (Sourate al-Qiçaç, 28:68).

L'Imam diffère du Prophète en ceci que le premier reçoit la révélation d'Allah, alors que le second reçoit les jugements du Prophète grâce à une orientation divine. Le Prophète est donc le communicateur du Message d'Allah, alors que l'Imam est le Communicateur des enseignements du Prophète. C'est du moins, ce que croent les Chiites imamites.

Pour les autres écoles juridiques musulmanes, l'imamat est une présidence générale des affaires de la religion et de la vie, et une représentation du Prophète et de ses jugements concernant les branches de la religion. (Pour plus de détails, voir: "Acl al-Ch`àh wa Ocoulahâ", pp. 210-221; "Al-Aqâ'id al-Ja`ariyyah", p. 27; "Al-Milal wal Nihal" d'al-Chahristânî, 1/33, "Charh al-Maqâçid", 5/232 etc.

86. )En effet, Allah dit: «Nous t'avons envoyé avec la Vérité comme annonciateur et avertisseur. Il n'existe pas de communauté où ne soit passé un avertisseur.» (Sourate Fâter, 35:24).

De même il y a beaucoup de Hadith qui indiquent que la Terre ne reste jamais sans "Argument d'Allah pour les serviteurs". Voir à cet égard: "Al-Uçoul min al-Kâfî", 1/136,137).

87.)Voir: "La Révélateur, le Messager, le Message", Moh. Baqir al-C,adr, traduct. A.A. al-Bostani, Ed., La bibliothèque ahl-ul-Bayt.

88.)l est de notoriété publique que les uléma sont partagés entre deux opinions - qui n'admettent pas une troisième - concernant la désignation de l'Imam. Les uns disent que l'Imamat est une affaire d'opinion et de choix, les autres affirment qu'il appartient à Allah seul de désigner l'Imam. Les Chiites imâmites recusent la légalité de la première opinion, car pour eux, c'est Allah qui doit choisir l'Imam et c'est Lui qui demande au Prophète de le faire connaître et d'ordonner aux gens de lui obéir après lui - comme l'a fait effectivement le Prophète, pour l'Imam Ali, à Ghadîr Kham. L'Imam ainsi désigné, désignera à son tour celui qui devra lui succéder à l'Imamat. Ou bien, pour être Imam, quelqu'un doit faire l'objet de miracle, car la condition de l'Imamat, c'est l'Infaillibilité, laquelle fait partie de mystère dont Allah Seul à connaîssance.

Pour les autres Ecoles Juridiques musulmanes: l'Imamat n'est pas conditionné par la désignation ou le testament du Prophète. Il peut se faire par simple prestation de serment d'alléreance (mubâya`ah) dont le mécanisme se résume en ceci que les "Gens qui lient et délient" (les dignitares de la Communauté) prêtent serment d'allégeance à quelqu'un en vue de l'Imamat. Dans ce cas, la condition de l'Infaillibilité est ignorée. De même, il n'est pas obligatoire que tout le monde prêtent serment d'allégeance à quelqu'un pour qu'il devienne Imam. Il suffirait même, pour le devenir qu'une seule personne le fasse en sa faveur. Pour les tenants de ces Ecoles, même s'il n'y a pas de "bay`ah", l'Imamat peut se faire par la force et la contrainte. Ainsi, selon eux, si l'Imam venait à décéder et que quelqu'un qui remplisse les conditions requises de l'Imamat, prétend à celui-ci sans obtenir la "bay`ah", mais en s'imposant aux gens par la force de son épée, il devient automatiquement Imam ou Calife, quand bien même il était pervers, corrompu, injuste et oppresseur! Ils assurent même que la destitution d'un "Imam" pervers n'est pas légale, sauf s'il était vaincu par un autre prétendant à l'Imamat, plus fort que lui, qui le destitue de force et prendre sa place.

Quel homme de bon sens pourrait admettre une telle opinion qui rend obligatoire l'acceptation de l'Imamat de quelqu'un de pervers, d'ignorant et d'oppresseur, pour la simple raison qu'il est plus fort qu'un autre et plus à même de vaincre les autres, même en recourant à la corruption et au crime?! Et pis, une opinion qui interdit que l'on destitue un tel imam pervers, sauf par l'un de ses sujets qui peut se montrer capable de le vaincre! Est-ce de ce genre il s'agit, lorsque les tenants de cette thèse mettent en avant un Hadith qui dit: «Quiconque meurt sans avoir connu l'Imam de son époque meurt en adepte du préislamique»?! Et comment les défenseurs de cette thèse pourraient-ils reconcilier cellle-ci avec le contenu de ce Verset coranique: «... Eh quoi! Celui qui dirige les hommes vers la Vérité n'est-il pas plus digne d'être suivi que celui qui ne dirige les hommes vers la Vérité n'est-il pas plus digne d'être suivi que celui qui ne dirige les hommes que dans la mesure où il est lui-même dirigé? Qu'avez-vous donc? Comment pouvez-voous juger ainsi?» (Sourate Younos, 10:35). (Pour plus de détails sur ce sujet, voir: "Nahj al-Haqq wa Kach al-C,idq", p. 168; "Charh al-Maqâçid", d'al-Taftâwânî, 5/233; "Al-Tamhîd", d'al-Bâqilânî", p. 186; "Acl al-Chî`ah wa Uçoulahâ", p. 22; "`Aqâ'id al-Ja`fariyyah", p. 29.

89.)Voir: "Al-Kâfî", 1/377, H. 3; "Al-Mahâsin", 1/176, H. 273; "`Oyoun Akhbâr al-Redhâ", 2/58, H. 214; "Kamâl al-Dîn", p. 413, h. 15; "Al-Ghîbah" d'al-No`mânî, p. 130, h. 6; "Rijâl al-Kich-chî", 2/724, H. 799; "Musnad al-Tayâlecî", 259/1913; "Olyat al-Awliyâ'", 3/224; "Al-Mo`jam al-Kabîr" d'al-Tabarânî, 10/350, H. 10687; "Mostadrak al-Hâkem", 1/77; "Charh Nahj al-Balâghah" d'Ibn Abil-Hadîd, 9/155; "Yanâbî` al-Mawaddah", 3/155; "Majma` al--Zawâ'id", 5/224; "Musnad Ahmad", 4/96.

90.)C'est l'occultation à propos de laquelle Allah dit: «à l'exception des polythéistes avec lesquels vous avez conclu un pacte; de ceux qui ne vous ont pas ensuite causé de tort et qui n'ont aidé personne à lutter contre vous. Respectez pleinement le pacte conclu avec eux, jusqu'au terme convenu. - Dieu aime ceux qui le craignent - » (Sourate al-Tawbah, 9:4).

91.)Il s'agit de Ehi`b Abî Tâlib dans lequel les Banî Hâchim, accompagnés des Banî `Abdul-Muttalib (à l'exception d'Abî Lahab) se sont réfugiés pendant deux ou trois ans, et autour duquel les Quraych posta des surveillants pour empêcher l'approvisionnement des régugiés. Ceux-ci ne sortaient durant cette période de leur réfuge que pendant la saison de `Omrah (au mois de Rajab) et la saison de Pèlerinage. Et au cours de cette période, c'était l'Imam Ali qui leur faisait parvenait les provision en catimi. (Voir: "Al-C,ahîh fî Sîrat al-Nabî", 2/108; "Lisân al-`Arab", 1/499).

extrait du livre : Les Croyances du Chiisme

Mohammad Redhâ al-Modhaffar

(E'dition revue, corrigée et annotée)

E'dité et traduit par

Abbas AHMAD Al-Bostani