Note aux lecteurs Comment j'ai été guidé

Note aux lecteurs
Nous avons le plaisir de vous offrir, ci-dessous, le livre "Comment j'ai été guidé" de Smaoui Mohamed Tijani.

C'est une autobiographie montrant que celui qu'Allah (swt) bénit de Sa grâce, arrive à force de recherche, à reconnaître la religion la plus proche de son Seigneur. C'est l'école de pensée d'Ahl-Al-Bayt (la Sainte Famille du Prophète) dont l'amour a été rendu obligatoire par le Saint Coran (Ach Choura (42), verset 23), et par le Saint Prophète lui-même.

A ceux qui n'ont pas encore eu l'occasion de le lire, j'incite expressement à le faire pour deux raisons:

1) pour que les frères et soeurs Shia Issna Asheri maîtrisent mieux les fondements de leurs propos religieux (ce qui n'est pas toujours le cas).

2) pour pouvoir répondre ou "s'armer" contre certains musulmans qui dénigrent chroniquement la foi chiite duodécimain.

"Man a'arafa nafssahou, faqad a'arafa rabbahou" (connaît-toi toi-même pour connaître ton Seigneur) dit un célèbre hadiçe de nos Massoumines (as)

Al Bouraq

DEDICACE
Mon livre est un témoignage, le récit d'un voyage, l'histoire d'une découverte an sein de l'Islam et dans ma foi.

Puisque toute découverte est basée sur l'esprit saint, et c'est la raison qui distingue l'homme des autres créatures. Je voudrais dédier ce livre à tout esprit éclairé qui sait discerner la vérité de l'erreur, à tout esprit animé du désir de compréhension.

Je dédis ce livre à tout être sachant comparer les idées et théories, et qui est capable de reconnaître ce qui est logique de ce qui ne l'est pas, et ce qui est authentique de ce qui est douteux et improbable.

Allah le tout puissant a dit: "Ceux qui écoutent le discours et en suivent le meilleur. Ce sont ceux-là que Dieu a bien guidés et ce sont ceux-là les gens doués de cerveau." Azzoumar -18.

A ceux-là je dédis mon livre, en espérant qu'Allah Loué soit-Il éclairera nos esprits avant nos yeux, pour nous guider et illuminer nos cœur, pour qu'il nous montre la bonne voie afin d'aller à lui, et la mauvaise voie à éviter, Daigne t-Il, nous accepter parmi ses serviteurs fidèles, car Il écoute et Il exauce.

Mohamed Tijani Smaoui
INTRODUCTION
Louange à Dieu, Seigneur de l'Univers, Il créa l'homme de la terre, et le façonna de la meilleure façon. Il l'a élevé au-dessus de toutes les créatures, Il ordonna à Ses Anges de se prosterner devant Lui.

Il lui fit don de l'esprit qui apporta la foi, Il le dota de yeux pour voir, d'oreilles pour entendre et de moyens pour s'exprimer.

Il lui envoya Ses Messages pour lui annoncer de bonnes nouvelles, pour l'avertir, pour l'alerter et l'empêcher de s'égarer en suivant le diable maudit.

Il lui interdit d'adorer Satan son ennemi. Il lui ordonna de n'adorer qu'Allah et de suivre le chemin droit avec conviction et compréhension. Et Il lui défendit de suivre les croyances de ses ancêtres, de ses amis ou de ses parents qui ont toujours suivi les croyances de ses prédécesseurs sans raisonner.

Qui donc a meilleur parler que celui qui a appelé à Dieu, qui a agi dans le bien,et qui a dit:"je fais partie des musulmans".
Foussilat, Verset 33.

Que les bénédictions, les salutations et la paix soient sur Son Messager Mohammed, qui apporta la grâce. Celui qui fut, le soutien des faibles et des opprimés, Sauveur de toute l'humanité de l'ignorance et des ténèbres, qui les guida sur la voie illuminée, celle des fidèles et des bienfaisants.

Que la bénédiction et les salutations d'Allah soient sur notre maître Mohammed Ibn Abdallah, le Prophète. Egalement sur sa descendance purifiée, qu'Allah a choisi parmi tous les fidèles comme exemples et guides à tous les croyants. Dieu nous incitait dans le Coran à les suivre, car Il les purifiait et les rendait infaillibles. Il a promis que quiconque montera sur leur vaisseau sera sauvé, et quiconque s'en abstiendra périra.

Que les bénédictions et les salutations soient sur les honorables Compagnons qui ont soutenu et honoré le Prophète et sa noble descendance, et se sacrifièrent pour la victoire de l'Islam. Ils ont connu la vérité et lui ont été fidèles avec conviction et sont restés sur le bon chemin, car ils étaient reconnaissants.

Qu'Allah les récompense pour leurs services rendus à l'Islam et aux musulmans. Que les bénédictions et les salutations soient sur leurs successeurs, et tous ceux qui demeurent et progressent sur le chemin droit, guidés jusqu'au jour du jugement.

ô Seigneur, exauce mon vœu, Tu connais tout et Tu entends tout.

ô Seigneur, ouvre mon cœur, c'est Toi qui nous conduit à la vérité absolue. Je te prie ô Seigneur de m'aider à mieux m'exprimer, car Tu octroies la Sagesse à quiconque parmi Tes fidèles adorateurs.

Je Te prie Seigneur de me prodiguer Ta connaissance et de me permettre de joindre Tes Serviteurs vertueux.


BIOGRAPHIE SOMMAIRE
Je me souviens encore, comment mon père m'a emmené avec lui à la Mosquée locale pour les prières rituelles, "Tarawih" pendant les nuits du mois de Ramadan. J'avais alors dix ans. Il m'a présenté aux hommes qui priaient là et qui ne pouvaient cacher leur étonnement.

Je savais d'avance que le Meddeb (enseignant du Coran) avait tout arrangé pour que je dirige les prières de "Ashfâa" pendant deux ou trois nuits.

J'étais habitué à la prière avec les enfants du quartier derrière lui, et j'attendais que l'Imam (dirigeant des prières) arrive à la sourate de Maryam, l'autre moitié du Coran.

Mon père veillait à nous apprendre le Coran aussi bien à l'école Coranique qu'à la maison. Un parent aveugle qui connaissait le Coran par cœur, nous donnait des leçons privées.

Voulant montrer sa bonne influence sur moi le "Meddeb" m'a appris les "Rakâa" (génuflexions) appropriées pendant les prières, il était fier que je puisse réciter le Coran dès le bas âge, et dut me tester plusieurs fois pour s'assurer que je comprenais bien toutes ses instructions.

Après avoir dirigé les prières et récité le Coran, comme je devais le faire, tous les hommes présents félicitèrent mon père et remercièrent mon "Meddeb" pour ses efforts, ils louèrent Allah pour la grâce de l'Islam.

Ces souvenirs me poursuivent encore maintenant car on m'admirait beaucoup et ma réputation s'était étendit au delà du quartier et jusqu'à la ville entière.

Ces nuits de Ramadan ont laissé leurs influences religieuses sur moi jusqu'à nos jours, et à chaque fois que je traverse une période de confusion, je sens un pouvoir mystérieux qui m'attire vers la bonne voie; et chaque fois que je sens la faiblesse de mon âme et la futilité de la vie, ces souvenirs s'élevant en moi et m'élevant spirituellement et en éclairant dans ma conscience la flamme de la foi pour me permettre d'assumer mes responsabilités. La charge qui me fut confiée par mon père et mon "Meddeb" (diriger la prière en bas âge) m'a fait sentir que je n'excellait pas, ou du moins que j'étais au delà de ce qu'en attendait de moi. C'est pour cela que j'ai passé mon enfance et mon adolescence dans une rectitude relative, mais pas sans jeux innocents et une avidité de connaître et d'imiter.

Pendant cette période que je fus entouré par la grâce divine de telle sorte que je fus tenu à l'écart des actes immoraux (sans en avoir le mérite puisque cela était la grâce de Dieu).

Je n'oublierai de mentionner que ma mère, qu'Allah bénisse son âme, avait une grande influence sur moi. Elle a ouvert mes yeux en apprenant les courtes "sourates" du Coran, ainsi que les prières et les prescriptions de la pureté rituelle. Elle m'entourait de soins particuliers parce que j'étais son premier fils et peut-être trouvait-elle une joie en m'éduquant, car elle partageait le foyer avec l'autre épouse de mon père et ses enfants.

Le nom de "Tijani" qui me fut donné par ma mère, avait une signification particulière chez la famille Smaoui. Elle s'est adhérée à la confrérie soufie des "Tijanis" depuis que l'un des fils du fondateur de l'ordre en Algérie a visité Gafsa, ma ville natale, où les familles éduquées et aisées contribuaient à l'expansion de la "Tijaniyya". A cause de mon nom: "Tijani", je devins très populaire dans la famille Smaoui et ailleurs, surtout chez ceux qui étaient rattachés à l'ordre "soufi". C'est pour cela plusieurs vieillards parmi les "prieurs" présents aux prières nocturnes de Ramadan venaient féliciter mon père, puis embrasser ma tête et ma main en disant:" C'est la grâce de notre maître le "Cheikh Ahmed Tijani"".

A noter que l'ordre "Tijani" est largement répandu au Maroc, en Algérie, en Tunisie, en Libye, au Soudan, en Egypte et surtout au Sénégal, et que ceux qui s'y rattachent sont parfois fanatiques, ils ne visitent pas les tombeaux d'autres saints et prétendent que tout les saints s'étaient communiqué leur Sagesse, tandis que leur "Cheikh Ahmed Tijani" avait reçu la sienne directement du Prophète - paix soit sur lui- bien qu'il naquit treize siècles après la mort du Prophète.

On racontait que le Cheikh Ahmed Tijani communiquait souvent avec le Prophète - paix soit sur lui- en lui parlant directement et non en rêve. Egalement que la fameuse invocation formulée par le Cheikh Ahmed Tijani vaut mieux que quarante récitations du Coran entier.

Mais je m'abstiendrai de m'étendre ici sur l'ordre Soufi des Tijanis et j'y reviendrai brièvement par la suite.

Ainsi j'ai grandi dans la croyance comme la plupart des jeunes de chez nous. Nous étions tous, Allah soit loué, des musulmans sunnites appliquant le rite de l'Imam Malek ibn Anès, l'Imam de la " Médina".

En Afrique du nord, nous sommes répartis en plusieurs ordres Soufis. Rien qu'à Gafsa seulement existent la "Tijaniyya", la "Kadiriyya", la "Rahmaniyya", la"Soulaïmyya" et la "Issawyya".

Chaque ordre mentionné a ses propres fidèles et sympathisants, qui récitent son "Dhikr"; ses poèmes dans tant de cérémonies particulières, telles que mariages, circoncisions et tant d'autres.

Mis à part leurs aspects négatifs, ces ordres Soufis ont joué un rôle important dans la préservation des rites religieux et pour le maintien du respect pour les Saints.

PELERINAGE A LA MECQUE
J'avais alors dix-huit ans quand l'organisation nationale des scouts Tunisiens a décidé de m'envoyer comme l'un des six représentants Tunisiens à la première conférence des scouts arabo-musulmans qui eu lieu à la Mecque.

J'étais le membre le plus jeune du groupe et certainement le moins instruit, car parmi nous, il y avait deux directeurs d'école, un professeur à la capitale, un journaliste et un cinquième dont j'ignorais la profession. Mais j'ai appris plus tard qu'il était un proche parent du Ministre de l'éducation national de cette époque.

Le voyage ne fut pas directe, notre première escale fut Athènes où nous sommes restés trois jours, la deuxième fut Amman capitale de la Jordanie où nous passâmes quatre jours. Puis nous sommes arrivés en Arabie Saoudite où nous participâmes à la conférence et accomplîmes les rites du "Hajj" et "Omrâ" Pèlerinage et visites des lieux Saints.

Je ne saurais décrire mes sentiments quand j'entrais dans la maison d'Allah pour la première fois. Mon cœur battait si vite qu'il faillit percer ma poitrine juste pour voir le symbole du monothéisme, puis les larmes coulèrent abondamment de mes yeux.

C'était comme si les Anges me haussaient au-dessus des autres pèlerins et m'élevaient sur le toit de la "Sainte Kâaba" d'où je répondais à l'appel d'Allah: "ô Allah me voici, Ton serviteur vient à Toi pour Te servir". Ecoutant d'autres pèlerins, j'ai compris que la plupart d'entre eux ai attendu longtemps et ont fait tant d'économies dans leur vie pour pouvoir venir à la Mecque et réaliser le pèlerinage.

Dans mon cas le voyage fut rapide et je ne m'y était point préparé.

Je me rappelle mon père, dès qu'il vit le billet d'avion et s'assura que j'allais réellement au pèlerinage, il eut les larmes aux yeux. En me disant adieu il m'embrassa et me dit chaleureusement: "Félicitations mon fils, Allah a voulu que tu fasses ce pèlerinage avant moi, tu es le fils de "Sidi Ahmed Tijani" ; prie Allah pour moi sitôt dans Sa maison, qu'il me pardonne, et que je puisse visiter aussi Sa maison en pèlerin".

J'ai senti qu'Allah Lui-même m'appelait, qu'Il prit soin de moi et m'amena dans le lieu que tous les musulmans désirent tant visiter.

J'ai tant apprécié cette occasion, ainsi j'ai accompli avec tant de zèle et de ferveur mes prières et mon "Tawaf" (cicumbulations autour de la Kâaba).

J'ai bien but de l'eau de Zamzam, et gravis la montagne "Annour", où les gens s'aventuraient à atteindre la grotte de "Hiraa".
Voulant être le premier, je fus devancé seulement par un soudanais, ainsi je fus le deuxième à cette course.

Quand je fus entré dans la grotte je me suis roulé par terre comme si j'étais au sein de la prophétie, sentant le souffle du Prophète, oh quels sublimes souvenirs! Ils m'ont si profondément marqué et impressionné qu'ils sont restés inoubliables.

Dieu eut soin de moi de plusieurs manières, tous ceux que j'ai rencontrés dans la conférence m'ont aimé, plusieurs d'entre eux m'ont demandés mon adresse pour correspondre.

Quant à mes compagnons Tunisiens, qui m'ont regardés d'un regard méprisant depuis notre première rencontre à Tunis, lors de l'élaboration du voyage.

Je compris leur attitude mais je fus patient, car j'ai toujours su que les gens du nord n'appréciaient pas beaucoup les gens du sud tunisien, et les considéraient comme arriérés, mais bientôt leur opinion commença à changer.

Pendant le voyage, la conférence et le pèlerinage, je me montrais digne de leur respect, grâce à ma connaissance de la poésie, j'ai gagné plusieurs prix. Ainsi je suis revenu dans mon pays avec plus de vingt adresses de pèlerins, de différentes nationalités.

Nous sommes restés en Arabie Saoudite vingt-cinq jours pendant lesquels je rencontrais plusieurs Savants musulmans et j'écoutais leurs conférences, j'étais influencé par quelques croyances des "Wahhabites", (secte dominante en Arabie Saoudite) et j'espérais que tous les musulmans les suivraient.

Je pensais qu'ils étaient l'élite choisi par Allah parmi Ses adorateurs pour protéger Sa maison, car ils étaient les plus purs et les plus savants sur la terre. J'ai cru qu'Allah leur avait donné du pétrole pour qu'ils servent l'Islam et prennent soin des pèlerins, les hôtes d'Allah le Miséricordieux.

Après le pèlerinage je suis retourné dans mon pays portant le costume saoudien. Je fus surpris par l'accueil que mon père avait préparé pour moi. Beaucoup de gens étaient venu à ma rencontre, ils étaient conduits par les Cheikhs des ordres "Issawiyya", "Tijaniyya" et "Kadiryya" avec leurs tambours de cérémonie. Ils firent le tour de la ville en chantant en ma compagnie, et chaque fois qu'ils passèrent devant une mosquée, ils s'arrêtaient pour un moment. Pendant que les gens (particulièrement les vieux), venaient me féliciter les larmes aux yeux, exprimant leur désir de voir le maison d'Allah, et visiter le tombeau de son Prophète. Beaucoup de gens me regardaient comme s'ils n'avaient jamais vu un jeune pèlerin de mon âge à Gafsa.

J'ai vécu les jours les plus heureux de ma vie pendant cette période, et beaucoup de gens, y compris les notables de la ville, venaient me rendre visite et me féliciter.

Ils m'ont souvent demandés de réciter la "fatihaa" (chapitre inaugural du Coran) avec des prières en présence de mon père, ce qui me gênait.

Chaque fois qu'un groupe de visiteurs quittait la maison, ma mère venait vers moi et brûlait de l'encens, et récitait quelques versets du Coran pour chasser "le mauvais œil".

Pour célébrer cet événement mon père a donné une fête pendant trois nuits au centre de l'ordre "Tijanyya", où il a égorgé un mouton chaque nuit pour le banquet. Les gens me posaient toutes sortes de questions, et la plupart de mes réponses étaient des éloges des Saoudiens.

Bientôt on commença à m'appeler "Hajj" (le pèlerin) et dans la ville le titre se rapportait à moi. Peu à peu je devenais célèbre parmi des groupes différents de musulmans et particulièrement chez les frères musulmans.

Je faisais le tour des mosquées, donnant des conférences sur des sujets religieux exhortant les gens à ne pas embrasser les tombeaux, ni toucher les mausolées pour la grâce parce que c'était surtout signe de polythéisme. Mes activités se multipliaient. Je donnais des leçons religieuses tous les vendredis avant le prêche de "l'Imam" à la mosquée "Abi-Yaaâcoub" ; la grande mosquée.

Les leçons religieuses du dimanche étaient surtout écoutées par mes élèves du secondaire du collège où j'enseignais la technologie et l'initiation technique. Ils appréciaient mes efforts. Je leur consacrais beaucoup de mon temps, essayant de les aider à être moins ignorants et mieux armés face aux athées et certains professeurs communistes.

Les étudiants avaient l'habitude de m'attendre avec impatience et voulaient rejoindre nos cercles religieux. Quelques uns parmi eux venaient à la maison, car j'apportais avec moi bon nombre de livres sur l'Islam. Je leur lisais ces livres avec méthode afin de pouvoir répondre à toutes leurs questions.

L'année même où j'ai accompli le pèlerinage à la Mecque je complétais l'autre moitié de mon devoir religieux en me mariant. C'était le désir de ma mère de me voir marié avant de mourir, car elle avait assisté aux mariages de tous mes demi-frères. Allah lui a donc attribué ce qu'elle espérait, car je me mariais avec une jeune fille que pourtant je n'avais jamais rencontré auparavant.

Ma mère mourut après qu'elle eut assisté à la naissance de mon premier fils et de mon second enfant.

Mon père décéda deux ans avant elle. Mais avant sa mort, il put accomplir le pèlerinage à la Mecque, il se tourna vers Allah et devint le plus pieux.

La révolution Libyenne connut une certaine popularité à cette période où les arabes et les musulmans se sentaient humiliés après la défaite de la guerre de six jours. Le leader libyen, parlait au nom de l'Islam et dirigeait les prières parmi son peuple exhortant les croyants à la libération "d'Al-koods" (Jérusalem).

Je fus engagé à ses idées, comme beaucoup de jeunes musulmans et arabes. Et par la suite, nous avons organisé une visite éducative en Libye. C'était un groupe de quarante enseignants, nous visitions le pays du début de la révolution, et quand nous sommes revenus chez nous, nous étions très optimiste. Nous espérions un futur meilleur pour les musulmans dans le monde.

Pendant les années précédentes j'avais correspondu avec quelques amis, mon amitié se renforça avec quelques uns parmi eux, ils m'avaient demandé de leur rendre visite, ainsi je préparais un voyage pour les vacances d'été qui durera trois mois.

J'avais l'intention aller en Libye et en Egypte par voie terrestre, et de là, je voulais me rendre au Liban, par voie maritime, puis en Syrie, en Jordanie et en Arabie Saoudite pour y accomplir la "Omra" (petit pèlerinage), et aussi pour renouveler mon allégeance à la secte des Wahhabites, car j'en faisais la propagande parmi mes étudiants et dans les mosquées fréquentées par les frères musulmans.

Ma réputation se répandit de ma ville natale aux autres villes environnantes, car quelques visiteurs qui assistaient aux prières du vendredi, en entendant mes leçons ils firent ma réputation, qui atteignit "Ismaîl El-Hadifi", Leader de l'ordre Soufi très connu à Tozeur, capitale du Djerid et lieu de naissance du fameux poète Tunisien "Aboul Kacem-Chabbi".

Le Cheikh Ismaîl influençait de nombreux disciples en Tunisie et à l'étranger particulièrement parmi les émigrés Tunisiens de France et d'Allemagne.

J'ai reçu une invitation de sa part par l'intermédiaire de ses agents à Gafsa, qui m'avaient écrit une longue lettre, me remerciant pour les services que je rendais à l'Islam et aux musulmans.

Dans cette lettre, ils ont prétendu que les services que je rendais ne me rapprochaient pas d'Allah, car je n'avais pas de "Cheikh" (un maître qui me guide) et ils disaient: "celui qui n'a pas de "Cheikh" a le diable pour maître. Tu dois avoir un Cheikh pour qu'il te montre la voie, autrement la moitié de ta connaissance est vaine".

Ils m'ont informé que Cheikh Ismaîl lui-même, m'avait choisi parmi tous les autres affiliés pour être l'un de ses adeptes les plus proches. Je fus absolument enchanté en apprenant ces nouvelles.

Je pleurais pour cette grâce Divine qui m'a élevé jusqu'aux cimes et aux meilleurs lieux, tout simplement parce que j'étais sur la voie de "Sidi Hadi Al-Hafine" qui était aussi un Cheikh Soufi connu pour ses miracles. Et je devins l'un de ses partisans les plus proches, et comme j'étais l'ami de "Sidi Salah Essayaah" et "Sidi Jilani" et d'autres Leaders soufis, ainsi j'ai attendu impatiemment cette rencontre.

Lorsque j'entrais dans la maison de "Cheikh Ismaîl" je regardais curieusement les visages, le lieu était envahi de ses adeptes et fidèles disciples, parmi lesquels se trouvaient les vieillards portant des habits blancs immaculés. Après la cérémonie de salutation, le Cheikh Ismaîl apparut et chacun se leva et lui embrassa les mains avec grand respect, son député me fit signe:

"c'est lui le Cheikh!". Mais je ne montrais pas mon enthousiasme, car je m'attendais à quelque chose de totalement différent de ce que je voyais.

En face de moi avançait un homme sans prestance ni charisme particulier et l'obséquiosité qui l'entourait me semblait sans commune mesure avec l'allure de sa personne. Cependant, il m'accueillit à son tour chaleureusement et me fit asseoir à sa droite, et m'offrit de la nourriture.

Après le dîner de la cérémonie rituelle, commença le colloque, son délégué à Gafsa m'a présenté à lui de nouveau. Il m'a demandé de faire acte d'allégeance au Cheikh et chacun des présents se réjouissait d'avance de cet honneur qui m'était attribué.

Plus tard j'ai réalisé ce poids qui me donnait ma relative célébrité, ce qui m'encouragea à questionner librement le Cheikh; je ne ressentais aucune gêne à intervenir et parfois à m'opposer aux réponses que je trouvais peu convaincantes. Certains n'appréciaient pas mon comportement révérencieux à l'égard du Cheikh.

Le Cheikh a senti l'atmosphère tendue, il a essayé de calmer la situation en utilisant son esprit, il dit: "celui qui commence par une rencontre brûlante, finira par une vie brillante". Le public considéra comme une grâce de la part du Cheikh.

Le Cheikh était intelligent et très expérimenté, il ne m'a pas laissé continuer mon intervention souvent provocatrice, il a raconté le conte suivant:

"Un jour, un homme Savant assiste à une conférence donné par le sage pieux, l'homme pieux demanda au Savant d'aller se laver; le Savant est allé se laver, après quoi il revint à la classe, l'homme pieux répéta sa demande "Va et lave-toi", le Savant partit se laver pour la deuxième fois, pensant qu'il ne s'était pas lavé correctement, quand il revint en classe, l'homme pieux lui demanda de se laver de nouveau, l'homme Savant se mit à pleurer, et dit: "Maître, je me suis lavé de tout mon savoir et de tous mes actes, et il ne me reste que ce qu'Allah va m'octroyer par tes mains". A ce moment- là, l'homme pieux dit: "Maintenant tu peux t'asseoir"."

Je me rendais compte alors que j'étais visé par le Cheikh et chacun des présents le comprenait également. Ils m'ont demandés de garder le silence, et de montrer plus de respect en présence du Cheikh, afin de ne pas échouer dans ma vie. Ils basaient leurs arguments sur le verset coranique suivant:

"ô vous qui avez cru! N'élevez pas la voix au-dessus de celle du Prophète, et ne lui parlez pas sur le ton que vous employez entre vous-même de peur de voir vos œuvres annihilées sans que vous sous en rendiez compte." Al-Houjourat, Verset 2.

Alors j'ai reconnu mes limites, j'ai obéi à leur ordre et le Cheikh m'a gardé auprès de lui, durant trois jours, pendant lesquels je lui posais beaucoup de questions, dont quelques unes pour tester ses connaissances.

Le Cheikh savait cela, et il me répondait qu'il y avait deux interprétations, et deux significations du Coran. L'une révélée apparente, et l'autre caché à un septième degré. Il a ouvert son coffre personnel, qui contenait la chaîne traditionnelle des pieux et des Savants sages qui le reliait avec l'Imam Ali Ibn Abi-Taleb, et à travers beaucoup de Saints tel que "Abdoulhassen-Chadhili".

Il faut remarquer ici que ces réunions faites par le Cheikh étaient des réunions spirituelles, et elles commençaient par quelques poèmes suivis par des chants et des récitations sur l'ascétisme, la piété et le renoncement à la vie d'ici-bas et l'avidité de chercher l'au-delà.

Tous les disciples contribuaient, chacun à leur tour en commençant par la droite du Cheikh, en récitant tout au moins un verset coranique. Peu à peu la confrérie se penchait à droite et à gauche, effectuant un balancement sur le rythme des chants. Le Cheikh se leva, et les disciples se levèrent à leur tour pour former un grand cercle autour de lui et ils commencèrent à dire:

"Ahh-Ahh-Ahh-Ahh!", ce qu'ils appellent l'invocation de la poitrine. Le Cheikh se tournait à chaque fois vers un disciple, l'atmosphère se modifiait, les danseurs commençaient à sursauter en criant dans un rythme organisé mais irritant.

Après cette activité éprouvante, le calme revint peu à peu. Le Cheikh récite son dernier poème, alors que les disciples lui embrassent la tête et les épaules avant de s'asseoir.

J'ai participé à leur rituel mais sans conviction, car cela contredisait mes croyances qui m'interdisent d'attribuer des associés à Allah et tout intermédiaire entre l'homme et son Créateur.

Je m'effondrais en pleurant, mon cœur et mon esprit étaient déchirés entre deux tendances contradictoires.

La première était l'idéologie soufie d'après laquelle l'homme traverse une expérience spirituelle, basée sur le sentiment de la crainte, sur l'ascétisme et sur l'effort pour se rapprocher de Dieu par l'intermédiaire de Ses Saints Serviteurs, Ses Savants et Sages.

La deuxième était l'idéologie des Wahabites qui m'ont enseignés que tout cela n'était que polythéisme qui ne sera jamais pardonné par Dieu.

Si le Messager d'Allah, Mohammed Lui-même, ne peut pas aider ou intercéder en faveur des gens, alors comment pourraient-ils le faire eux les Saints et les Pieux qui sont venus après Lui?!.

Malgré la position qui me fût conféré par le Cheikh, car il me désigna comme son délégué à Gafsa. Je n'étais pas convaincu. Bien que je sympathisais parfois avec l'ordre soufi que je respectais pour l'amour d'Allah et de Ses Saints. J'avais en mémoire le verset:

"N'invoques avec Dieu aucun autre dieu. Il n'y a de dieu que Lui." Al Kassas, Verset 88.

Parallèlement au verset:

"ô croyants! Craignez Dieu et cherchez un moyen intermédiaire." Al Maaida, Verset 35.

Les Oulémas Saoudiens m'ont enseignés: "le moyen et l'intermédiaire n'est que la bonne action."

Mon esprit était troublé, mais les disciples du Cheikh venaient chez moi de temps à autre pour célébrer les rituelles nocturnes et "l'invocation de la poitrine" telles que je les ai décrite.

Mes voisins étaient gênés par les brouhahas de nos voix: "Ahh-Ahh-Ahh!." Ils se plaignaient auprès de ma femme par l'intermédiaire de leurs épouses, quand je l'ai su, je demandais aux disciples de célébrer leur récital ailleurs, et je me suis excusé auprès d'eux en les informant que je partais en voyage pour une durée de trois mois, ainsi j'ai dit adieu à ma famille, à mes amis, et j'ai imploré la protection d'Allah.

LE VOYAGE EN EGYPTE
Je suis resté à Tripoli, la capitale libyenne, afin d'obtenir le visa pour l'Egypte grâce à quelques amis que Dieu les récompense pour leurs efforts.

La route pour le Caire était longue, trois jours et trois nuits durant lesquelles je partageais une "voiture de louage" avec quatre égyptiens qui travaillaient en Libye et qui rentraient chez eux, pendant le voyage je bavardais avec eux, et je leur récitait le Coran. Ils m'ont appréciés et m'ont invités à descendre chez eux en Egypte. J'ai choisi parmi eux Ahmad qui n'était pas loin de mes idées et qui était pieux, il m'offrit une très grande hospitalité, que Dieu le récompense.

Je suis resté au Caire vingt jours durant lesquels j'ai rencontré le célèbre chanteur Farid El-Atrache dans son immeuble sur le Nil. Je l'admirais pour sa modestie, son humilité et sa générosité, j'ai réussis à le voir pendant vingt minutes seulement car il allait prendre l'avion pour le Liban.

Puis j'ai visité le fameux psalmodieur du Coran le Sheikh Abdulbass et Mohamed Abdoussamad dont j'aimais beaucoup la voix, je suis resté chez lui trois jours durant lesquels j'ai discuté avec ses proches et ses amis, ils m'appréciait pour mon enthousiasme, ma franchise et mes connaissances, s'ils parlaient de l'art je chantais, s'ils parlaient de soufisme et de l'ascétisme je m'identifiais de l'ordre de "Tijanyya" et "Madanyya", s'ils évoquaient l'Occident je parlais de mes visites à Paris, Londres, Belgique, Hollande, Italie et Espagne pendant les vacances d'été. Et s'ils parlaient de pèlerinage, je les surprenaient en parlant de la Mecque, je leur parlais des endroits que j'avais visités, encore inconnus de bien des pèlerins, tels que la grotte de Hira, la grotte Thaor, la place du sacrifice d'Ismaïl etc. S'ils parlaient de sciences et technologie, je trouvais toujours le vocabulaire adapté et enfin en politique, je leur exprimais mes points de vue en disant: " que Dieu bénissent l'âme de Naceur Salaheddine Ayoubi, qui s'est privé de sourire, et lorsque l'un de ses proches l'a critiqué en lui disant que le Saint prophète souriait souvent, il répondit: "Comment voulez vous que je souris pendant que la mosquée de Jérusalem est occupé par les ennemis d'Allah. Non par Dieu, je ne sourirais jamais avant sa libération."

Quelques Savants d'Al-Azhar qui assistaient à ces discussions ont beaucoup appréciés et aimés ce que je récitais du Coran et de la Sounna du Prophète, ils étaient impressionnés par mes arguments solides et m'ont demandés, de quelle université je venais, je répondait fièrement:

l'université Ezzeitouna qui était fondé avant Al-Azhar du Caire, j'ajoutais que les Fatimides qui ont construits Al-Azhar venaient de Mahdia de Tunisie. Aussi à l'université d'Al-Azhar j'ai rencontré plusieurs Savants et accepté beaucoup de livres qui m'étaient offerts.

Un jour pendant que j'étais dans le bureau d'un responsable officiel des affaires d'Al-Azhar, un membre du conseil du commandement de la révolution égyptienne vint pour l'inviter à une réunion de masse qui regroupe les musulmans et les coptes dans l’une des plus grande compagnie de chemin de fer du Caire.

Le responsable m'a invité chaleureusement à venir avec lui, ma place était à la tribune d'honneur entre le Savant "Azhri" et le père de "Chenouda".

On me demanda de faire un discours dans cette réunion, ce que je fis comme j'en avais l'habitude dans les mosquées, et les comités culturels de mon pays.

Je commençais à me sentir important et j'avais une grande confiance en moi, je pensais que j'étais vraiment un homme Savant. Comment ne pas ressentir ce sentiment, quand un grand nombre d'Oulémas m'incitaient à le croire et me proposaient d'enseigner à Al-Azhar.

On m'a permis de voir quelques reliques du Saint Prophète, un officier de la mosquée de l'Imam Houssein (as) au Caire m'a emmené dans une pièce privée, il a ouvert une cassette, et en sortit la chemise du Saint Prophète me l'a présenté et m'a permit de l'embrasser, puis il m'a montré d'autres reliques appartenant au Prophète.

En sortant de cette chambre je pleurais et j'étais touché par ce geste rare, car l'officier m'a laissé entendre que le Prophète Lui-même m'avait autorisé de voir ses reliques. Je l'ai cru d'autant plus qu'il a refusé de prendre de l'argent, enfin et après mon insistance il en prit une petite somme, et m'a félicité d'être l'un de ceux que la grâce du Saint Prophète a honoré.

Sans doute cette visite a laissé une trace profonde sur moi, je pensais pendant quelques nuits à ce que disaient les wahàbites saoudiens à savoir que le Prophète comme toute autre personne et que son influence est vaine, et son rôle est terminé, je n'aimais pas cette idée et j'étais convaincu qu'elle était erronée. Surtout si, le prouve le Coran, le martyr qui meurt en guerre sainte, n'est pas réellement mort:

"Ne prend surtout pas ceux qui ont été tués sur le chemin de Dieu pour des morts mais plutôt des vivants recevant des leur subsistance auprès de leur Seigneur." (Alé Imràne: verset 169)

Alors que dire de notre Prophète Mohammad qui est la miséricorde de tout ce monde et le parfait exemple à suivre.

Je devenait de plus en plus clairvoyant en comparant les doctrines wahàbites et soufis, je m'interrogeais sur ces confréries qui confiaient toute leur réflexion au bon vouloir d'un Sheikh, qui dirigeait entièrement la vie des ses adeptes.

Mais ne m'avait-on pas appris un hadith Koudoussi:

" Mon servant, obéis tu seras comme moi - tu diras à la chose soit et elle deviendra réelle. "

La lutte intérieure commençait à me miner, mais à ce moment là mon voyage en Egypte touchait à sa fin, j'ai visité pendant les derniers jours un grand nombre de mosquées de l'imam Malek et celle de l'imam Abou Hanifa, de l'imam Ahmad ibn Hanbal et de l'imam Chafey, ainsi que la mosquée de Saida Zainab et de l'Imam Houssein, j'ai prié dans toutes les mosquées, j'ai aussi visité le "Zaouya" de l'ordre Soufi "Tijanyya". J'aurais d'histoires à raconter concernant ces visites, mais je préfère être concis.

RENCONTRE A BORD
Je voyageais du Caire à Alexandrie à la date prévue, car j'avais réservé ma place dans un bateau Egyptien de la ligne de Beyrouth. Je me sentais très fatigué physiquement et mentalement, et dès mon embarquement sur le bateau, j'allais me coucher pour deux ou trois heures, lorsque je me suis réveillé j'ai entendu une voix me disant: "Le frère semble être épuisé?"

J'ai répondu affirmativement: "Le voyage du Caire à Alexandrie m'a épuisé, et pour être à l'heure j'ai sacrifié trop d'heures de sommeil."

J'ai compris à son accent qu'il n'était pas Egyptien et ma curiosité me poussait à faire sa connaissance. Je me suis présenté à lui, et j'ai appris qu'il était Irakien, conférencier à l'université de Bagdad, s'appelait Monem, et venait en provenance du Caire où il avait présenté sa thèse de doctorat à l'Université Al Azhar.

Nous commençâmes une conversation sur l'Egypte et le monde Arabo-Musulman, nous parlions de la défaite des Arabes et de la victoire des juifs, les sujets dans ce domaine sont malheureusement nombreux. J'expliquais que la cause de la défaite était la division des arabes et des musulmans en plusieurs petits pays, ainsi malgré leur population nombreuse, ils n'avaient pas de poids statique.

Nous parlions beaucoup de l'Egypte et des Egyptiens, et nous étions d'accord sur les raisons de cette défaite. J'ajoutais que je considérais cette division comme ayant été aggravée par les puissances coloniales, afin de faciliter notre occupation et notre humiliation.

J'exposais également mon dépit face aux divisions religieuses entre les "Malikites" et les "Hanifites". Je lui racontais une triste histoire qui m'était arrivé à la Mosquée "Abou-Hanifa" au Caire. Où un homme après la prière, me demanda pourquoi je ne croisais pas les bras en priant, j'ai répondu avec respect et courtoisie que je suis "Maliki" et que les "Malikites" préfèrent détendre les mains pendant les prières, il me répondit brutalement: "Va à la Mosquée des Malikites alors et fais tes prières là bas!".

J'ai quitté la Mosquée avec dégoût et amertume et de plus en plus perplexe face à l'état de ma religion.

Le professeur Irakien a sourit en m'annonçant qu'il était un Chi'ite, j'étais troublé par cette nouvelle et sans réfléchir je lui ai dis: "Si je savais que tu étais un Chi'ite, je ne t'aurais parlé" ; il m'a demandé: "Pourquoi ?".

Je répliquais: "Parce que vous n'êtes pas musulmans!; vous adorez Ali Ibn Abi-Taleb, et les modérés parmi vous adorent Dieu, mais ne croient pas au Message du Saint Prophète Mohammed au lieu de le donner à Ali.

Pendant que je continuais mon argumentation mon compagnon m'écoutait attentivement, souriant quelques fois et montrant son étonnement maintes fois.

Quand je terminais il m'a demandé de nouveau: "Es-tu un professeur qui enseigne à des étudiants ?" J'ai répondu: "Oui."

Il me dit alors gravement: "Si les professeurs pensent ainsi, nous ne pouvons blâmer les gens ordinaires qui ont une éducation modeste."

-"Que veut tu dires ?"

-"Je m'excuse mais d'où as-tu- recueillis ces fausses rumeurs ?"

Je lui exposais mes informations venant des ouvrages célèbres d'histoire, et des gens illustres et des connaissances communes.

Il dit: "Laissons ce que disent les gens, mais peux-tu me citer un seul ouvrage célèbre ?".

Je commençais à mentionner quelques livres tel que Fajr-al salam, de l'écrivain historien Ahmed Amine et d'autres.

Il répondait toujours calmement: "Depuis quand Ahmed Amine est une autorité sur le Chi'isme ?, cela n'est pas une preuve !" Il ajouta: "Pour être honnête, il faut se référer aux sources originelles du sujet."

Je dis: "Pourquoi devrais-je entreprendre des recherches sur un sujet déjà connu de tous ?".

Il répondit: "Ahmed Amine Lui-même a visité l'Irak, et j'étais l'un des professeurs qu'il a rencontré à Najaf. Nous lui avons reproché ses écritures sur le Chi'isme, il a alors reconnu qu'il ne savait rien des Chi'ites et qu'il en rencontrait pour la première fois. Nous lui avions dit que cette excuse est la pire de toutes, comment pouvait-il écrire des choses aussi calomnieuses sur nous, alors qu'il ne savait rien de nous !?

Frère, si nous jugions les juifs et les chrétiens d'après le Coran, certes ils n'accepteraient pas le jugement, en dépit du fait que le Coran est notre preuve absolu, pour cela nous devons montrer leurs erreurs dans leurs livres, la preuve sera plus forte et indiscutable et en accord avec le principe:

"Un témoin de sa famille fit le témoignage."

Ses paroles tombèrent dans mon cœur comme de l'eau fraîche dans la bouche d'un assoiffé, je m'étais déterminé à changer d'attitude et à devenir un vrai chercheur, car je sentais que seule une logique saine peut apporter une preuve solide, je me devais d'écouter attentivement ce nouveau compagnon, je repris la discussion:

-"Alors tu es l'un de ceux qui croient au Message de notre Saint Prophète Mohammed ?"

Il répondit: "Que la paix et la bénédiction d'Allah soit sur Mohammed et sa descendance. Tous les Chi'ites sont comme moi et croient en son Message. Frère tu ferais mieux de mener des recherches toi-même, ainsi tu n'auras plus de doute sur tes frères Chi'ites, parce que ces doutes peuvent devenir un péché."

Il ajouta:

"Si tu désire vraiment connaître la vérité et la voir de tes propres yeux, alors je t'invites à visiter l'Irak et là tu pourras rencontrer les Savants Chi'ites et les gens ordinaires également, tu vas reconnaître ainsi la vérité du mensonge".

J'ai dis: "ça a été mon désir de visiter l'Irak un jour, et de voir son patrimoine historique célèbre, spécialement l'héritage des "Abassides", et en particulier ceux de "Haroun Errachid", mais premièrement mes ressources financières sont limités à la "Omra" (visite à la Mecque et Médina). Deuxièmement mon passeport ne me permet pas d'entrer en Irak".

Il dit: "Premièrement, quand je t'ai invité à visiter l'Irak cela veut dire que je payerais ton voyage de Beyrouth à Bagdad "aller-retour", tu seras mon hôte personnel en Irak. Quand au passeport et l'entrée en Irak, laissons cela à Allah qu'Il soit Exalté, s 'Il t'a destiné à visiter l'Irak, cela se fera même sans passeport.

Cependant nous allons essayer d'obtenir un visa d'entrée dès que nous arriverons à Beyrouth.

J'étais très touché par cette offre, j'ai promis à mon ami de lui communiquer ma décision le lendemain, s'il plaît à Dieu. Je suis sortis de la cabine, j'étais monté au pont pour respirer l'air frais, les yeux perdus à l'horizon, mon esprit méditait.

Je glorifiais "Allah" Créateur de tout l'Univers, je le remerciais de m'avoir amené à cet endroit, je Lui demandais, Loué Soit- Il, de me protéger du mal et de la faiblesse, et de me protéger contre les erreurs.

Mon esprit vagabondait et présentait devant mes yeux une série d'événements de mon passé, le bonheur que j'ai goûté depuis mon enfance jusqu'à ce jour, je rêvais d'un avenir meilleur.

J'avais l'impression que Dieu et Son Messager me prodiguaient une attention particulière. Je regardais vers l'Egypte dont les côtes apparaissaient de temps à autre sur l'horizon.

Je disais adieu à la terre où j'avais embrassé la chemise du Prophète.

C'était le souvenir le plus précieux que je gardais de l'Egypte. Je me rappelais aussi des paroles du nouvel ami Chi'ite qui avait apporté à mon cœur une grande joie, à la perpective de réaliser un rêve qui me tentait depuis l'enfance: "La visite de l'Irak", le pays qui rappelle le règne fantastique d'Arrachid et de Maamoun, les fondateurs de l'Université de Sagesse qui recevait les étudiants occidentaux quand la civilisation islamique était à son apogée.

De plus, l'Irak est le pays du fameux Cheikh Abdoulkader Jilani dont la réputation a atteint tous les pays, et dont l'ordre soufi est entré dans chaque ville et chaque village, son ardeur et son zèle dépassait tout autre.

Je parcourais une mer d'imagination et d'espoir, je fus réveillé par le haut-parleur appelant les voyageurs pour le dîner. Je me dirigeais vers l'endroit désigné, les gens étaient nombreux, ils se bousculaient comme d'habitude à chaque rassemblement. Chacun voulait entrer le premier, les cris s'élevaient, j'essayais d'entrer par tous les moyens, subitement, le Chi'ite m'a attiré doucement en arrière en disant: "Ne te fatigues pas frère, on mangera plus tard sans bousculade. En faite, je te cherchais partout, Allons faire nos prières, après quoi nous viendrons dîner lorsque la foule sera dispersée."

J'ai apprécié son idée, ainsi je l'ai accompagné dans un endroit isolé, après les ablutions, je l'incitais à diriger les prières pour le tester et observer sa façon de prier. J'avais l'intention de refaire mes prières un peu plus tard.

Dès qu'il commença la prière du "Maghreb" en récitant les versets coraniques et les invocations, mon esprit fût transporté, et je me suis senti alors guidé par l'un des nobles compagnons du Prophète qui craignaient Dieu et que j'admirais tant.

Après la fin des prières, il a récité des invocations que je n'avais jamais entendu dans mon pays, ni dans aucun autre, je me sentais à l'aise à chaque fois que je l'entendais dire des louanges sur notre Saint Prophète Mohammed et sur sa descendance, que la paix d'Allah et Sa bénédiction soit sur Lui et sa Descendance.

J'ai remarqué que les larmes coulaient de ses yeux, je l'ai entendu pleurer en priant Dieu pour qu'il ouvre mon cœur, me donne la clairvoyance et me guide sur la bonne voie.

Nous sommes allés au réfectoire qui était presque vide, il s'assied après moi, il changea mon assiette avec la sienne qui contenait plus de viande, il me traitait comme si j'étais son hôte personnel, avec courtoisie et gentillesse, et il me racontait les dires du Prophète concernant l'étiquette de table.

J'étais impressionné par son moral, et lorsqu'il a dirigé les prières de "Al-Ichaa" qu'il a étendues en récitant plusieurs supplications qui m'ont fait pleurer, j'ai imploré Dieu. Loué Soit- Il., de changer ma suspicion à l'égard de cet homme car certaines conjectures sont un péché, mais que fallait-il penser ?!.

J'ai dormi cette nuit-là en rêvant de l'Irak, des "milles et une nuit", je me suis réveillé en entendant l'appel de mon ami Chi'ite pour faire les prières de "Al-Fajr", après l'achèvement des prières nous parlions de la grâce de Dieu et de Ses bienfaits envers les musulmans.

Nous nous sommes endormis à nouveau, mais à mon réveil, il était assis sur son lit, rosaire à la main, il récitait les noms d'Allah, ainsi je me sentais plus confiant, mon cœur se rassura, j'ai demandé à Dieu de pardonner ma suspicion.

Pendant le déjeuner, on annonçait l'approche des côtes libanaises et le débarquement dans deux heures s'il plaît à Dieu. Mon ami m'a demandé si j'avais bien réfléchi et quelle était ma décision ?.

J'ai répondu si Dieu le veut, et si j'obtiens le visa d'entrée, je ne vois pas d'inconvénient, puis je l'ai remercié pour son invitation.

Nous passâmes une nuit à Beyrouth, et dès notre arrivée à Damas nous étions à l'ambassade d'Irak. Et rapidement j'ai obtenu mon visa avec une facilité incroyable, il me félicita et remercia Dieu pour Son aide.

MA PREMIERE VISITE EN IRAK
Notre voyage de Damas à Bagdad se déroula dans un bus climatisé de la compagnie internationale de "Najaf", car la température était de quarante degrés à Bagdad. A notre arrivée, nous nous dirigeâmes directement vers sa maison qui était dotée de l'air conditionné, je me suis bien reposé.

Il apporta des fruits et de la nourriture, pendant que les membres de sa famille entraient pour me souhaiter la bienvenue avec respect et politesse. Son père m'embrassa comme s'il me connaissait depuis longtemps. Quand à sa mère, vêtue de noir, elle me souhaita la bienvenue également.

Mon ami s'excusa pour sa mère qui ne pouvait pas me serrer la main, car cela n'était pas dans leurs habitudes de politesse islamique. Ils témoignaient ainsi à leur façon du respect du aux femmes. J'ai apprécié cela, je me suis dis: ces Chi'ites que nous accusons de dévier la religion, semble l'observer et l'appliquer plus que nous.

Pendant mon séjour en compagnie de mon amie Momeen, j'ai observé ses nobles manières, sa vertu, sa dignité, et sa générosité. J'ai aussi apprécié sa modestie et sa grande pitié que je n'avais pas encore perçu chez une autre personne avant cela. Je ne me sentais pas du tout comme un étranger, mais chez-moi.

Des lits nous ont été préparés sur le toit de la maison, je veillais tardivement "suis-je dans le monde du rêve ou de réalité ?
Suis-je vraiment à Bagdad tout près de "Sidi Abdelkader-Jilani ?" "

En écoutant ces propos, mon ami riait et me demandait ce que les Tunisiens pensaient à propos de Abdelkader-Jilani ?.

Je racontais les miracles et mystères qui lui étaient attribués. Les confréries qui se construisent en son honneur, et qu'il est pour elles le noyau du cercle, comme le Prophète Mohammed était le sceau des prophètes, ainsi Abdelkader-Jilani est le sceau de tous les saints. De même que Jilani disait: "Tous les gens tournent autour de la "Kaâba", mais elle, tourne autour de moi."

J'essayais de le convaincre que le "Cheikh Abdelkader" venait à ses disciples en état d'éveil pour soigner leurs souffrances. En parlant de "Sidi Abdelkader" j'oubliais ou j'essayais d'oublier la croyance Wahhabite.

Lorsque je remarquais le manque d'enthousiasme de mon ami, j'essayais de convaincre mon esprit que tout cela était juste, mais en doute je lui demandais son opinion. Mon ami rit et dit: "Repose-toi cette nuit, demain si Dieu le veut, nous irons visiter le Cheikh Abdelkader", cette nouvelle m'a comblée de joie et je voulais que le jour se lève aussitôt. Mais j'étais si fatigué que je suis tombé dans un sommeil très profond, de telle sorte que je ne m'étais réveillé qu'après le lever du soleil, et l'appel pour la prière était déjà passé.