PREFACE DU TRADUCTEUR Science et Croyance

Science et Croyance Essai sur l'application de la méthode inductive

aux Croyances fondament

(Allah) LE MESSAGER (Le Prophète) LE MESSAGE (L'Islam)
Par Mohammad Bâqer al-Sadr Edité et traduit par Abbas Ahmad al-Bostani Publication de la Cité du Savoir

Editeur: Abbas Ahmad al-Bostani C.P. 712 Succ. (B) Montréal, Qc., H3B 3k3 Canada ISBN 2-922223-08-6
********************************************************

PREFACE DU TRADUCTEUR
Si son Eminence Sayyed Mohammad Bâqer al-Sadr (ou al-Sadr) était l'un des nombreux uléma(1), mujtahid(2) et faqih(3) que la ville Sainte de Najaf (4) a formés et présentés avec fierté à la Ummah (la Nation islamisque), il était également l'un des principaux penseurs contemporains dont celle-ci peut s'enorgueillir. Et si atteindre le degré de " 'âlim"(5), de "mujtahid", de "faqîh", exige une érudition absorbante en matière de "Charî'ah" (la Loi islamique), de jurisprudence islamique (fiqh) et une connaissance très solide de l'histoire de l'expérience islamique; être un "penseur contemporain" nécessite, pour le moins une large culture dans un tout autre domaine, celui de diverses philosophies modernes et de différents courants de la pensée contemporaine. Le martyr Muhammad Bâqer Al-Sadr a justement le mérite quasi exceptionnel de posséder les deux domaines à la fois. Car déjà s'affirmer comme mujtahid au sein de l'école chiite, n'est pas tâche aisée, et impose au postulant à cette distinction un effort soutenu et épuisant de recherche qui s'étend parfois sur toute une vie, et laisse peu de temps pour d'autres occupations.Le mujtahid Muhammad Bâqer Al-Sadr s'était penché sur la pensée matérialiste - capitaliste et marxiste - à un moment où elle envahissait la Ummah qui sombrait dans un état de léthargie, provoqué par l'accumulation des erreurs et des déviations qui l'ont détournée de la bonne direction fixée par le Coran et la Sunna(6); à un moment où l'on a cru que cet envahissement culturel devrait éclipser à jamais la pensée islamique, en la réduisant à une "affaire cultuelle" entre le pieux et Son Seigneur, ou en la rangeant dans un recoin du passé et de l'histoire; à un moment où l'intelligentsia du monde musulman, envoûtée et aveuglée qu'elle était par le mirage que faisait miroiter la culture matérialiste qu'on lui avait imposée, pensait que l'Islam et les exigences de la pensée et de l'époque moderne ne font pas bon ménage.

C'est pendant cette phase critique que traversait la Ummah, que son Eminence Al-Sadr, connaissant parfaitement les larges et diverses possibilités d'application de la pensée islamique, et n'ignorant rien des lacunes et des erreurs de calculs des idéologies matérialistes, a décidé de lancer son défi islamique. Aussi, dans la série d'ouvrages qu'il écrit, va-t-il s'appliquer à opposer aux solutions fragmentaires et souvent éphémères de ces idéologies, une philosophie islamique intégrale, de nature à la fois constante et évolutive, caractérisée comme l'Univers, par des lois immuables et des vérités éternelles d'une part, des éléments circonstanciels et mobiles d'autre part; une philosophie capable, de ce fait, de s'adapter à l'évolution de l'humanité tout en évitant de verser dans la déviation et de s'écarter de la marche universelle dont elle ne pourra jamais saisir les méandres, lesquels dépassent les capacités de la science et les limites de la raison humaine.

Ainsi dans "NOTRE PHILOSOPHIE", Al-Sadr, après une analyse objective des diverses philosophies matérialistes, anciennes et modernes - notamment le matérialisme dialectique - qu'il remonte jusqu'à la source première, les confronte systématiquement aux données de la philosophie islamique.

Dans un second ouvrage colossal, "NOTRE ECONOMIE", une sorte de traité économique, dont la première partie est consacrée à l'exposé de différents aspects de l'économie capitaliste et de l'économie socialiste, l'auteur nous incite à découvrir avec lui, dans les différentes sources de la "Chari'a", tous les éléments constitutifs d'une véritable économie islamique dépouillée aussi bien des défauts du système économique capitaliste que des inconvénients de l'économie marxiste. Ce livre peut être considéré comme le premier et le seul essai économique islamique moderne, par ses précisions, par ses détails et par les solutions islamiques qu'il propose aux problèmes actuels dont souffre l'humanité.

Dans "LA BANQUE NON USURAIRE", Sayyed Mohammad Bâqer Al-Sadr traite d'une question qui touche à la fois le vif de la société capitaliste moderne - la banque comme nécessité impérieuse - et de la société islamique - l'interdiction formelle de la pratique de l'intérêt usuraire et du loyer de l'argent. L'auteur nous y présente les moyens de fonder une banque islamique qui, tout en supprimant le rôle néfaste et parasitaire d'usurier, que joue la banque capitaliste, conserve de celle-ci sa mission purement économique.

Dans "LES FONDEMENTS LOGIQUES DE L'INDUCTION", ouvrage très spécialisé, où il est fréquemment question d'opérations de calcul des probabilités, le martyr Al-Sadr présente au lecteur une nouvelle étude de l'induction, visant à montrer la base logique; commune à la science naturelle et à la croyance de Dieu.

Dans "RECHERCHE SUR AL-MAHDI", l'auteur propose à ceux qui ne veulent pas croire au prodige et au surnaturel, d'examiner dans un esprit scientifique le miracle d'Al-Mahdi, et leur montre que ce qui n'est perceptible par leur raison, de prime abord, peut être plausible pour et par la science.

Venons en maintenant à l'ouvrage que nous présentons ici au lecteur francophone. Il s'agit initialement d'une introduction que l'auteur a écrite pour sa thèse de mujtahid, "AL-FATAWA AL-WADHIHAH" (Les Décrets Juridico-Religieux Claires) - sorte de traité pratique dans lequel le mujtahid donne son interprétation personnelle de la Loi islamique pour permettre à ses disciples de s'acquitter correctement de leurs obligations religieuses.

Mais en raison de l'importance de la nature spécifique du sujet dont il traite ici, l'introduction fut détachée de la thèse pour être publiée à part. L'auteur reprend dans ce livre sa thèse sur "Les Fondements Logiques de l'Induction" pour en donner quelques illustrations précises et quelques applications concrètes. Il s'efforce de nous expliquer qu'on peut démontrer l'existence de Dieu, le caractère divin de la Prophétie de Muhammad et du Message islamique, en suivant les mêmes démarches du raisonnement inductif scientifique, utilisées par les savants pour étayer la théorie de la séparation de la Terre du Soleil, par exemple. La valeur scientifique de ce livre ne se dément pas, et le lecteur y découvre que la science loin d'être incompatible avec la religion, peut et doit aider au renforcement de la foi en Dieu.

Pour mettre la méthode scientifique à la portée des lecteurs de différents niveaux, l'auteur dont tantôt des exemples très simples tirés de la vie quotidienne, tantôt des illustrations scientifiques techniques et complexes qu'il s'efforce de simplifier autant que possible. La nature de la méthode conduit parfois l'auteur à nous entraîner dans le labyrinthe du calcul des probabilités qui peut paraître à la fois trop complexe pour le profane, schématisé et simpliste pour le spécialiste.

En traduisant ce livre, nous avons essayé d'exprimer aussi clairement que possible la pensée de l'auteur, tout en respectant son style, le choix du vocabulaire et le langage qu'il utilise, ce qui n'a pas manqué de laisser partout présentes les traces de la traduction. Que le lecteur nous en pardonne. Car notre souci principal est de rester aussi proche que possible du texte arabe.

Abbas A. Al-Bostani

**************

Au nom de Dieu, Le Clément, Le Miséricordieux

AVANT-PROPOS
Certains ulémas éminents ainsi qu'un grand nombre de nos étudiants et de nos fidèles m'ont demandé de suivre l'exemple de mes prédécesseurs et de leurs oeuvres, concernant un sujet dont l'importance grandit jour après jour: il s'agit de joindre à mon "Traité Pratique"(7), comme c'est l'habitude chez les Ulémas, une introduction brève ou détaillée, portant sur la démonstration de l'existence de Dieu et sur la pertinence des Fondements (uçûl)(8) de la religion islamique. Car un "Traité Pratique", c'est l'expression de l'effort de recherche personnelle sur les statuts de la Charî'ah(9) islamique que Dieu révéla par l'intermédiaire du Sceau des Prophètes(10) pour le bienfait des mondes. Or, cette expression se fonde essentiellement sur l'acceptation de ces "Uçûl", car la croyance en Dieu, le Révélateur, au Prophète, le Messager et au Message que Dieu envoya, constitue la base du contenu de tout "Traité Pratique" et la preuve de sa nécessité.

Mû par le désir de servir le Seigneur et estimant que la nécessité d'une telle action est grande, j'ai répondu positivement à cette requête.

Mais ce faisant, je me suis confronté à la question suivante: dans quel style devrais-je écrire cette introduction? Devrais-je m'efforcer de l'écrire dans un style aussi clair et aussi facile que celui du livre (Al-Fatâwâ al-Wâdhihah)(11) auquel elle est destinée, pour que le lecteur qui est censé comprendre le jugement juridique de ces "Fatâwâ"(12) puisse la comprendre aisément?

Réflexion faite, je me suis rendu compte qu'il y a une différence essentielle entre l'introduction en question et le livre auquel elle doit être rattachée.

Alors que le livre se borne à exposer les lois religieuses et les résultats de l'ijtihad(13)

et de la déduction, sans les démontrer ni les discuter, l'introduction proposée ne se contente pas d'exposer les sujets qu'elle aborde et doit les démontrer. Car, d'une part, la conviction est une obligation religieuse lorsqu'il s'agit des Fondements Religieux, et d'autre part, le but de l'introduction est d'enraciner les piliers et les fondements de la religion.

Or, cet enracinement ne peut se faire que par la démonstration.

Cela dit, la démonstration elle-même comporte des degrés. Mais ces degrés, même les plus simples et les plus évidents d'entre eux, sont totalement convaincants. Et si l'homme conservait sa conscience à l'état libre et naturel, le mode de démonstration le plus simple lui suffirait pour croire au Créateur Avisé: "Est-ce eux, les créés de rien, ou eux, les créateurs" (Coran LII, 35).


Malheureusement, la pensée moderne, depuis deux siècles, n'a pas laissé à cette conscience sa liberté et sa pureté. C'est pourquoi la démonstration nécessite un approfondissement, lorsqu'elle est destinée à un individu imprégné de la pensée moderne et de ses méthodes de recherche, afin de combler les vides que la conscience libre comblait elle-même, dans la démonstration la plus simple et la plus Là encore, je me devais d'opter pour l'un des deux choix suivants qui s'offraient à moi:

- soit j'écris l'introduction à l'intention de ceux dont la conscience reste libre et à l'écart des courants de la pensée moderne; dans ce cas, la démonstration doit être simplifiée, l'expression claire et compréhensible pour la plupart des lecteurs de "Al-Fatâwâ Al-Wâdhihah";

- soit à l'intention de ceux qui vivent la pensée moderne, étudient dans son cadre et apprennent plus ou moins de ses positions vis-à-vis de la théologie.

J'ai fini par opter pour la seconde solution.

Cela dit, je me suis efforcé d'être en général clair, en écrivant au niveau des intellectuels moyens, universitaires ou théologiens. J'ai évité autant que possible les termes et les expressions mathématiques et les évocations compliquées. Mais en même temps, j'ai préservé au lecteur plus averti son droit à une compréhension plus exhaustive, en lui résumant certains points profonds et en le renvoyant, pour plus de détails, à mes autres ouvrages, tel "AL-USUS AL-MANTIQIYYA LIL-ISTIQRE' " (Les Fondements Logiques de l'Induction). De même, j'ai essayé de faire en sorte que le lecteur d'un niveau moins élevé trouve dans certaines parties de cette introduction une nourriture intellectuelle assimilable et une démonstration convaincante. Sur un plan général, la première démarche de la démonstration scientifique inductive de l'existence du Créateur peut être à elle seule suffisante et claire. Nous allons tout d'abord traiter de la question du Révélateur, de celle du Messager de Dieu ensuite, et de celle du Messager enfin. Pour mener à bien ma tâche, je ne compte que sur Dieu Auquel je me suis confié et Auquel j'appartiens.

**********************

PREMIERE PARTIE:LE REVELATEUR (AL-MURSIL)
CROIR EN DIEU : IL EST BENI ET EXALTE
L'Homme est parvenu à croire en Dieu depuis les temps les plus reculés. Il L'a adoré, Lui a voué sa fidélité, et a éprouvé un profond attachement à Lui, avant de connaître toute abstraction spéculative et philosophique et d'atteindre la compréhension complète des modes de démonstration.

Cette croyance n'est ni le rejeton d'une contradiction des classes, ni le produit d'exploiteurs injustes voulant consacrer leur exploitation, ni le fait d'exploités, victimes d'injustice et désireux d'y trouver une échappatoire; car elle a précédé dans l'histoire de l'humanité, toutes contradictions de ce genre.

Elle n'est pas non plus la conséquence d'appréhensions quelconques, ni d'un sentiment d'effroi devant les catastrophes naturelles et leurs comportements hostiles. Si la religion était le fruit de la peur et le résultat d'un sentiment de terreur, les gens les plus religieux seraient, tout au long de l'histoire, les plus peureux et les plus enclins à l'effroi. Or, ce sont les gens les plus courageux et les plus aguerris qui ont porté l'étendard de la religion à travers les temps.

Au contraire, cette croyance est le reflet d'un penchant original qui pousse l'Homme à s'attacher à son Créateur, et d'un sentiment intime et solide qui lie l'être humain d'une façon infuse au Seigneur et à son Existence.

Dans une étape ultérieure de son histoire, l'homme s'est mis à philosopher sur les choses de l'existence qui l'entouraient. Il en a tiré des notions générales telles l'existence, le néant, le devoir, la possibilité, l'impossibilité, l'unité, le nombre, la complexité, la simplicité, la partie, le tout, le progrès, le sous-développement, la cause et l'effet. Il a tendu à les utiliser et à les appliquer plutôt dans le domaine de la démonstration afin de mieux étayer sa croyance originelle en Dieu, de la traiter philosophiquement et de la remettre en évidence par des méthodes de recherche philosophique.

Lorsque l'expérience est devenue un instrument de savoir dans le domaine de la recherche scientifique, et que les penseurs ont réalisé que ces notions générales ne suffisaient pas, à elles seules, à découvrir les lois de la nature, ni à connaître les secrets de l'Univers, ces derniers (les penseurs) ont acquis la conviction que la sensation et l'observation scientifique constituent le point de départ essentiel pour la recherche des dits secrets et lois.

Ce courant sensualiste de la recherche était en général utile pour développer l'expérience humaine de l'Univers et pour l'élargir dans une grande mesure.

Il commença sa démarche par l'affirmation que la sensation et l'expérience sont deux instruments que la raison et la connaissance humaine doivent utiliser pour découvrir les secrets de l'univers et son système complet qui entourent l'homme. Ainsi, au lieu d'un Aristote - par exemple - qui s'assiérait dans sa chambre fermée et calme, méditant sur le type de lien qui existerait entre le déplacement d'un corps, d'un point donné de l'espace vers un autre, et la force motrice, et en concluant que le corps en mouvement s'immobilise dès que la force motrice s'épuise, un Galilée arrive qui observe les corps mobiles pour en prendre note et en déduire un autre résultat et un lien différent entre le mouvement du corps et la force qui l'anime: lorsqu'un corps rencontre une force qui le met en mouvement, il ne cesse son mouvement (lors même que cette force s'épuise) que s'il s'expose à une autre force qui l'arrête.

Le sensualisme en question tend donc à encourager les chercheurs dans le domaine de la nature et des lois des phénomènes de l'Univers, d'accomplir leur recherche à travers deux étapes: la première est celle de la sensation et de l'expérience et du rassemblement de leurs données; la seconde est l'étape rationnelle, celle de la déduction et de la coordination de ces données, en vue de parvenir à une interprétation générale et acceptable.

Le sensualisme, dans sa réalité scientifique et à travers les pratiques de ses savants, ne prétendait point se passer de la raison. Par ailleurs, aucun des savants de la nature n'a pu découvrir, par la sensation et l'expérience, un secret de l'univers ni une loi de la nature sans le concours de la raison. Car le savant rassemble dans la première étape les notes que lui fournissent ses expériences ainsi que ses propres notes, et dans la seconde étape, il les confronte dans sa raison, jusqu'à ce qu'il parvienne à un résultat. A notre connaissance, aucune conquête scientifique n'a pu se réaliser sans la conjugaison des deux étapes, la première traitant de l'aspect sensible, la seconde ayant trait à l'aspect déductif et rationnel que la raison réalise et qui ne peut être perçu directement par les sensations.

Ainsi, prenons l'exemple de la loi de l'attraction universelle. Newton n'a perçu par la sensation directe ni la force d'attraction entre deux corps ni le fait qu'ils sont inversement proportionnel au carré de la distance entre leurs centres et directement proportionnels au produit de la multiplication de leurs masses; mais il a perçu par la sensation la chute de la pierre lorsqu'elle est lâchée dans l'air, ainsi que la révolution des planètes autour du Soleil. Il s'est mis alors à penser aux deux phénomènes ensemble, et s'est efforcé de les expliquer tous deux en s'aidant des théories de Galilée et de l'accélération régulière des corps tombant sur terre ou dégringolant sur des surfaces en pente, et en bénéficiant des lois de Kepler qui traitent du mouvement des planètes et dont l'une stipule que "le carré du temps de la révolution de chaque planète autour du soleil est proportionnel à la distance qui l'en sépare"(14).

C'est donc à la lumière de toutes ces connaissances et observations qu'il découvrit la loi de l'attraction universelle en vertu de laquelle "tous les corps matériels s'attirent mutuellement, en raison de leurs masses et en raison inverse du carré de leurs distances".

Cette tendance sensualiste et expérimentale de recherche sur le système de l'Univers aurait pu et dû fournir un nouvel argument excellent à la croyance en Dieu, en raison de ses possibilités de découvrir toutes sortes d'harmonie (dans les phénomènes de l'Univers)(15) et les preuves de la sagesse qui indiquent l'existence du Créateur. Mais les savants naturalistes, en tant que savant de la nature, n'étaient pas préoccupés par l'éclaircissement de cette question, considérée encore à l'époque comme un problème philosophique, selon la classification en vigueur, des problèmes et des questions du savoir humain. Néanmoins, des tendances philosophiques rationnelles n'ont pas tardé à faire leur apparition dans le domaine de la philosophie et à l'extérieur du cadre de la science , et à tenter de rationaliser ce sensualisme et à l'ériger en philosophie. Elles ont annoncé que le seul moyen de la connaissance est la sensation, que là où s'arrête la sensation, s'arrête la connaissance de l'homme, et que tout ce qui ne peut être soumis ni d'une façon ni d'une autre, à l'expérience, l'homme n'a pas moyen de le prouver.

Partant de cette affirmation, on a vite fait de se servir de ce sensualisme et de la science expérimentale pour réfuter l'idée de la croyance en Dieu: puisque Dieu n'est pas un être perceptible par la sensation, et qu'on ne peut ni Le voir ni avoir la sensation de Son Existence, on ne peut donc pas Le prouver.

Cette utilisation impertinente du sensualisme n'était pas le fait des savants qui avaient pratiqué avec succès l'expérimentation, mais d'un groupe de philosophes de tendance rationaliste qui lui ont donné une interprétation philosophique ou rationnelle inexacte.

Mais peu à peu, ces tendances extrémistes sont tombées dans la contradiction. Sur le plan philosophique, elles se sont trouvées acculées à renier, en bloc et en détail, la réalité objective, c'est-à-dire l'Univers dans lequel nous vivons, puisque d'après elles, l'Homme ne possède que la sensation et que celle-ci lui fait connaître les choses telles qu'il les sent et non pas telles qu'elles sont. Ainsi lorsque nous percevons une chose, nous pouvons affirmer qu'elle existe dans notre sensation; quant à son existence, en dehors de notre conscience, d'une façon objective, indépendante et antérieure à la sensation, nous ne pouvons la prouver. En voyant la lune dans le ciel, nous pouvons affirmer seulement que nous voyons et percevons la lune en ce moment-là. Quant à savoir si la lune existe réellement dans le ciel et si elle existait avant que nous n'ouvrions nos yeux pour la voir, les tenants de ces tendances étaient incapables de l'affirmer, exactement comme le strabique qui voit des choses qui n'existent pas et affirme qu'il les voit, mais sans pouvoir affirmer leur existence dans la réalité.

Ainsi, la sensation elle-même a cessé d'être le moyen de connaissance du sensualisme philosophique. Au lieu d'être son moyen de connaissance, elle est devenue son terme final. La connaissance sensitive n'existait plus comme un phénomène indépendant de notre conscience et de notre perception.

Sur le plan rationnel, le sensualisme dans sa version la plus moderne s'est acheminé vers la position suivante: si la véracité ou la fausseté de la signification d'une phrase ne peuvent être vérifiées par la sensation ou l'expérience, la phrase est considérée comme un groupe de mots dépourvus de sens, exactement comme des lettres de l'alphabet qu'on prononce dans un ordre dispersé. Mais lorsque l'on peut vérifier la véracité ou la fausseté de sa signification, elle constitue un mot ayant un sens. Dans ce second cas, si la sensation établit la conformité de sa signification à la réalité, la phrase est véridique. En revanche, si cette sensation établit le contraire, elle est considérée comme fausse. Ainsi, si l'on dit: "La pluie tombe du ciel en hiver", on fait là une phrase significative - par son contenu. Mais si l'on dit: "La pluie tombe en été", la phrase a un sens, mais dont le contenu est faux. Et si on dit: "Une chose qu'on ne peut ni voir ni percevoir tombe la "Nuit du Destin"(16)", on a là une phrase dépourvue de sens, abstraction faite de sa véracité ou de sa fausseté, puisqu'on ne peut en vérifier le contenu ni par la sensation ni par l'expérience; car c'est exactement comme si on disait: ""DIZE"(17) descend la Nuit du Destin". De même que cette phrase-ci n'a pas de sens, cette phrase-là n'en a pas non plus.

Par conséquent dire: "Dieu existe", c'est comme si l'on disait: ""Dize" existe". De même que la seconde phrase est dénuée de sens, la première l'est aussi. Puisqu'on ne peut connaître Dieu par la sensation et l'expérience.

Ce courant rationaliste se heurte lui aussi à une contradiction pour la simple raison que son raisonnement, basé lui-même sur l'extrapolation, ne peut être perçu par la sensation et la perception directe, et devient ainsi une parole dénuée de sens, dans la conclusion qu'il a tirée ici. En prétendant que toute phrase dont la signification ne peut être vérifiée par la sensation et l'expérience est dénuée de sens, ce rationalisme procède lui-même de ce fait par généralisation. Or toute généralisation dépasse le cadre de la sensation; car celle-ci ne couvre que des cas partiels limités. De cette façon, ce courant a fini par se contredire lui-même, outre qu'il contredit toutes les généralisations scientifiques par lesquelles les savants interprètent d'une façon globale les phénomènes de l'Univers; car la généralisation - toute généralisation - ne peut être perçue directement par la sensation, elle est plutôt induite et démontrée à partir des indices fournis par des phénomènes sensibles limités(18).

Heureusement, la science n'a pas prêté attention, dans son cheminement et son évolution continuelle, à ces courants. Elle poursuivait ses recherches sur les découvertes de l'univers, toujours à partir de la sensation et de l'expérience; et tout en passant outre les limites étroites des tendances philosophiques et rationalistes, elle déployait des efforts rationnels en vue de coordonner les phénomènes, de les replacer dans des cadres normatifs généraux et de découvrir les liens et les relations qui existent entre eux.

Parallèlement, l'influence philosophique et rationnelle des tendances extrémistes s'est réduite, même au niveau des doctrines philosophiques matérialistes. Ainsi, la philosophie matérialiste moderne représentée par les matérialistes-dialecticiens, refuse franchement toutes ces tendances et s'arroge le droit d'outrepasser le cadre de la sensation et de l'expérience qui constitue la première phase par laquelle le savant commence sa recherche, ainsi que celui de la seconde phase par laquelle il achève sa recherche, afin de pouvoir comparer les différentes données de la science, de leur donner une interprétation théorique générale et de déterminer les liens et les relations éventuels qui existent entre elles.

Lorsque le matérialisme dialectique, dernier héritier du matérialisme dans l'histoire, a abouti à une interprétation globale de l'Univers dans un cadre dialectique, il est devenu lui-même, métaphysique, selon le point de vue des tendances sensualistes extrémistes.

Cela signifie que le matérialisme et le théisme s'accordent pour dépasser le cadre de la sensation (que les tendances matérialistes extrémistes affirmaient pourtant qu'il ne faut pas franchir) et qu'il serait admis désormais que la connaissance passe par deux phases, celle de la ressemblance des données de la sensation et de l'expérience, et celle de l'interprétation théorique et rationnelle de ces données.Mais ce qui sépare le théisme du matérialisme, c'est le type de l'interprétation qu'il faut déduire des différentes données de la science au terme de la deuxième phase. Alors que le matérialisme propose une interprétation qui renie l'existence d'un créateur avisé, le théisme pense que ces données ne peuvent être convaincantes que si elles admettent l'existence d'un Créateur Avisé.

Nous allons à présent exposer deux types de démonstration de l'existence du Créateur Avisé. Chacune d'elles incarne les données de la sensation et de l'expérience d'une part, l'organisation rationnelle de ces données en vue d'en déduire l'existence d'un Créateur Avisé de cet Univers, d'autre part. Nous appelons la première démonstration, scientifique (inductive), la seconde démonstration, philosophique. Avant de commencer par la première démonstration, c'est-à-dire la démonstration scientifique, il convient tout d'abord, de la définir. La démonstration scientifique est toute démonstration basée sur la sensation et l'expérience et suivant la méthode du raisonnement inductif fondé sur le calcul des probabilités.

C'est donc cette méthode du raisonnement inductif fondé sur le calcul des probabilités, que nous allons adopter comme méthode de démonstration scientifique en vue de prouver l'existence du Créateur(19). C'est pourquoi nous appellerons la démonstration scientifique de l'existence du Créateur: démonstration inductive.

A. LA DEMONSTRATION SCIENTIFIQUE DE L'EXISTENCE DE DIEU Nous avons déjà dit que la démonstration scientifique de l'existence de Dieu adopte la méthode du raisonnement inductif basé sur le calcul des probabilités.

Avant de passer en revue cette démonstration, nous aimerons expliquer d'abord cette méthode et l'apprécier ensuite, afin de savoir dans quelle mesure nous pouvons nous y fier pour découvrir les vérités et reconnaître les choses.

La méthode de la démonstration inductive fondée sur le calcul des probabilités, a des formes complexes et un haut degré de précision. Une appréciation globale et précise de cette méthode nécessite une étude analytique complète des fondements logiques de l'induction et de la théorie de la probabilité(20). Aussi, prenons-nous soin d'éviter au lecteur ces difficultés ainsi que toutes formules complexes et toute analyse difficilement compréhensible. Pour cela nous allons entreprendre ci-dessous deux démarches:

1. Déterminer la méthode de la démonstration que nous allons suivre en expliquant et résumant ses démarches.

2. Apprécier cette méthode et déterminer dans quelle mesure nous pouvons nous y fier. Pour ce faire, nous ne procéderons pas par analyse rationnelle ni par l'explication des bases logiques et mathématiques sur lesquelles elle est fondée - car cela nous obligerait à aborder des questions complexes et des idées fort délicates - mais en nous référant à ses autres applications scientifiques admises généralement par tout homme normalement constitué. Nous expliquerons que la méthode adoptée dans la démonstration de l'existence du Créateur Avisé est celle même que nous utilisons aussi bien dans les démonstrations de notre vie ordinaire et quotidienne que dans celle des recherches scientifiques et expérimentales, démonstrations auxquelles nous faisons une entière confiance. Et puisque nous faisons confiance à cette méthode pour démontrer les vérités scientifiques et les vérités de la vie quotidienne, nous devons lui faire confiance également pour démontrer l'existence du Créateur Avisé, Lequel est la base de toutes les vérités. C'est ce que nous allons voir et expliquer dans les lignes qui suivent.

Dans votre vie quotidienne et habituelle, lorsque vous recevez une carte postale, vous pouvez deviner dès que vous la lisez qu'elle vient de votre frère par exemple.

Lorsque vous constatez qu'un médecin réussit à guérir de nombreux cas de maladie, vous lui faites confiance et vous estimez qu'il est habile.

Lorsqu'une ampoule de pénicilline que vous vous faites injecter dans dix cas de maladie provoque chez vous après chaque utilisation, des symptômes similaires, vous en déduisez que votre corps a une allergie particulière contre la matière de la pénicilline.

Dans toutes ces déductions et dans bien des cas similaires, vous utilisez, en réalité, la méthode de la démonstration inductive, basée sur le calcul des probabilités.

Sur un autre plan, lorsque le savant a remarqué à travers sa recherche scientifique, des propriétés particulières dans le système solaire et en a conclu que les astres qui le composent, faisaient en fait partie du Soleil et s'en étaient séparés par la suite; lorsqu'il a démontré l'existence de Neptune, l'une des planètes de ce système, en la déduisant de l'observation des trajectoires des mouvements des planètes, avant qu'il ne découvrît Neptune par la sensation; lorsqu'il a déduit, à la lumière de phénomènes précis, l'existence des électrons avant la découverte du microscope atomique, il a suivi - dans tous ces cas - en vérité, la méthode du raisonnement inductif, basée sur le calcul des probabilités.

C'est cette même méthode que nous allons adopter pour démontrer l'existence du Créateur Avisé; et c'est ce que nous allons voir clairement lorsque nous passons en revue cette démonstration.

1. La Détermination de la méthode et de ses démarches:
La méthode de la démonstration inductive basée sur le calcul des probabilités peut se résumer - pour être simple et claire - en cinq démarches:

* Primo: nous envisageons dans le cadre de la sensation et de l'expérience, des phénomènes nombreux.

* Secundo: après les avoir observés et rassemblés, nous passons à la phase de leur interprétation. Ce qui est demandé dans cette phase c'est de trouver une hypothèse valable pour interpréter tous ces phénomènes et les justifier. Par "valable pour interpréter ces phénomènes", nous entendons que si l'hypothèse était établie dans la réalité, elle devait pouvoir sonder - et concorder avec - l'existence de tous ces phénomènes (qui existent effectivement).

* Tertio: nous remarquons que si cette hypothèse n'est ni justifiée ni établie dans la réalité, la chance de l'existence de l'ensemble de ces phénomènes réunis est très mince. En d'autre termes, si nous supposons que l'hypothèse est inexacte, le rapport de la probabilité de l'existence de tous ces phénomènes, à la probabilité de leur inexistence, ou tout du moins de l'inexistence de l'un deux, est très faible: un pour cent ou un pour mille... par exemple.

* Quarto: nous concluons, de la démarche précédente, que l'hypothèse est juste; et dans ce cas, notre preuve de sa justesse est l'existence de ces phénomènes que nous avons perçue dans la première démarche.

* Quinto: la possibilité de ces phénomènes de démontrer l'hypothèse - émise dans la deuxième démarche - varie en raison directe du rapport de la probabilité de l'existence de l'ensemble de ces phénomènes, à la probabilité de leur inexistence(21) - au cas où l'hypothèse était inexacte.

Plus ce rapport est faible, plus la possibilité de la démonstration accroît pour atteindre, dans beaucoup de cas ordinaires le degré de la certitude totale de l'exactitude de l'hypothèse(22).

En fait, il y a des règles et des critères précis fondés sur le calcul des probabilités pour la détermination de la valeur d'une probabilité. Dans les cas ordinaires, l'homme applique d'une façon naturelle et innée, et presque très correctement, ces critères et ces règles. C'est pourquoi nous nous contentons de nous baser ici, sur l'appréciation naturelle et innée de la valeur de la probabilité, sans entrer dans les détails complexes des fondements logiques et métaphysiques de cette appréciation(23).

Telles sont donc les démarches qu'on suit habituellement dans tout ce raisonnement inductif basé sur le calcul des probabilités, que ce soit dans le domaine de la vie ordinaire, ou celui de la recherche scientifique, ou celui de la démonstration que nous allons suivre pour prouver l'existence du Créateur Avisé.

2. L'Appréciation de la méthode:
Pour apprécier la valeur de cette méthode à travers des applications et des exemples, comme nous l'avons promis, nous commençons ci-dessous par quelques exemples de la vie courante:

Nous avons déjà dit que lorsque vous recevez une carte postale, que vous la lisez et que vous en déduisez qu'elle vient de votre frère - et non pas d'une autre personne désirant correspondre avec vous- vous vous livrez, en fait, à un raisonnement inductif fondé sur le calcul des probabilités. Et si évidente que cette déduction puisse vous paraître, vous l'avez, en vérité, réalisée par un raisonnement inductif identique à celui dont nous parlons.

Ainsi la première démarche que vous avez effectuée mentalement, était celle de confronter plusieurs "phénomènes" - indications - tels: le fait que le nom de l'expéditeur correspond parfaitement à celui de votre frère, que l'écriture de la lettre, dans tous ses détails - la graphie de tout l'alphabet - est identique à celle de votre frère, que les mots, les signes de ponctuation sont disposés de la même façon à laquelle votre frère vous a habitué, que le style, l'expression et leur degré de solidité, ainsi que leurs points faibles et leurs points forts correspondent entièrement à ceux de votre frère, que l'orthographe et les fautes d'orthographe sont les mêmes, que les informations fournies par la lettre correspondent à celles que votre frère connaît, que votre correspondant vous demande dans sa lettre des choses et exprime des opinions qui traduisent parfaitement les besoins et les opinions de votre frère...

Telles sont donc les indications (les phénomènes) que vous avez remarqué dans la première démarche.

Dans la seconde démarche vous vous demandez si cette lettre est envoyée réellement par votre frère, ou bien par un autre individu portant le même nom?

Là, vous émettez une hypothèse de nature à expliquer et à justifier toutes ces indications: "La lettre est bel et bien de mon frère". Car si elle est de votre frère, il est tout à fait normal qu'elle comporte toutes les données que vous avez remarquées dans la première démarche.

Au cours de la troisième démarche, vous vous posez la question suivante: "Si la lettre n'était pas de mon frère, mais d'une autre personne, quelle serait la chance qu'elle contienne toutes les données et les particularités que j'ai observées lors de la première démarche?"

Pour qu'il y ait vraiment une telle chance, il faut admettre l'existence d'un grand nombre de coïncidences correspondant au nombre de toutes les données et particularités observées: il faut supposer qu'il s'agit d'une personne qui porterait le même nom que votre frère et aurait la même écriture - graphie, disposition des mots - le même style, la même expression, le même niveau linguistique et orthographique, le même nombre d'informations et de besoins, ainsi que beaucoup d'autres circonstances et équivoques. Or, la probabilité de la réunion d'un tel nombre de coïncidences est très faible. Et plus le nombre de coïncidences dont il faut supposer l'existence augmente, plus la probabilité s'affaiblit.

Les fondements logiques de l'induction nous apprennent comment évaluer une probabilité et nous expliquent comment elle s'affaiblit proportionnellement à l'augmentation du nombre de hasards qu'elle suppose. Mais il n'est pas nécessaire pour un lecteur non averti, d'entrer dans de tels détails difficiles et complexes. Heureusement, la faiblesse de la probabilité ne dépend pas impérativement de la compréhension des dits détails, pas plus que la chute d'un homme par terre ne dépend de sa compréhension de la force de l'attraction, ni de sa connaissance de l'équation scientifique de la loi de l'attraction scientifique. Vous n'avez pas besoin de faire un grand effort pour comprendre la chance de l'existence d'un individu qui ressemble à votre frère par tous ces détails est très improbable. La banque non plus, n'a pas besoin d'assimiler les fondements logiques de l'induction pour comprendre que le degré de la probabilité de voir tous ces clients retirer en même temps leurs dépôts bancaires, est très bas, alors que la probabilité qu'un ou deux les retirent est très vraisemblable.

Dans la quatrième démarche, vous dites: étant donné qu'il est peu probable de trouver toutes ces indications dans la lettre si celle-ci n'était pas de mon frère, il est donc probable qu'elle est de mon frère.

Dans la cinquième démarche, vous reliez la forte probabilité - pour laquelle vous avez opté dans la quatrième démarche et selon laquelle "la lettre est bien de votre frère" à la faible probabilité de la troisième démarche selon laquelle "il est peu probable de trouver toutes ces indications dans la lettre si celle-ci n'était pas de votre frère", et en concluez que la forte probabilité est inversement proportionnel à la faible probabilité. Ainsi, plus cette faible probabilité s'affaiblit, plus la forte probabilité croît, se renforce et devient encore plus convaincante. Et s'il n'y a pas de contre-indications susceptibles de laisser penser que cette lettre n'est pas de votre frère, les cinq démarches suffisent pour vous amener à la conviction totale qu'elle vient de lui.

Après cet exemple tiré de la vie quotidienne de tous les hommes, nous prenons un autre exemple, tiré des procédés qu'utilisent les savants pour démontrer et prouver une théorie scientifique, en l'occurrence celle de la naissance des planètes. Selon cette théorie, les neuf planètes sont originaires du Soleil et s'en étaient séparées il y a des millions d'années sous forme de morceaux flambants. Les savants s'accordent généralement sur l'origine des planètes mais divergent quant à la cause de leur séparation du Soleil.

La démonstration de l'origine de la planète, se fait selon les démarches suivantes:

Dans la première démarche les savants ont observé plusieurs phénomènes et les ont perçus par la sensation et l'expérience. Parmi ces phénomènes soulignons les suivants:

1. la révolution de la Terre autour du Soleil est en concordance avec la rotation du Soleil sur lui-même, celle-ci et celle-là s'effectuant dans le sens ouest-est.

2. la rotation de la Terre autour d'elle-même concorde avec la rotation du Soleil autour de lui-même (ouest-est).

3. la Terre tourne autour du soleil sur une orbite parallèle à son équateur (du Soleil), de telle sorte que le Soleil forme un pôle et la Terre un point situé sur l'orbite.

4. les mêmes éléments dont se compose la Terre existent plus ou moins dans le Soleil.

5. il y a une concordance des quotients des éléments sur la Terre et sur le Soleil. L'Hydrogène y est, par exemple, l'élément dominant.

6. la vitesse de la révolution de la Terre autour du Soleil et autour d'elle-même concorde avec la vitesse de la rotation du Soleil autour de lui-même.

7. l'âge de la Terre concorde avec celui du soleil, selon l'estimation, faite par les savants, de l'âge respectif des deux planètes.

8. l'intérieur de la Terre est chaud, ce qui prouve que la Terre fut très chaude à sa naissance.

La deuxième démarche: les savants ont trouvé une hypothèse qui peut expliquer tous les phénomènes qu'ils avaient observés dans la première démarche. Autrement dit, si l'hypothèse est établie dans la réalité, elle doit pouvoir justifier et sonder tous le phénomènes en question. Selon cette hypothèse, la Terre faisait corps avec le Soleil avant de s'en séparer pour une raison quelconque; c'est ce qui doit nous permettre d'expliquer ces phénomènes.

Ainsi, dans le premier phénomène, selon lequel "la révolution de la Terre autour du Soleil concorde avec la rotation du Soleil autour de lui-même, celle-ci et celle-là s'effectuant dans le sens ouest-est", la concordance s'explique - en admettant la plausibilité de l'hypothèse - par le fait que lorsqu'un morceau se sépare d'un corps qui tourne, tout en y restant attaché par un fil ou par un autre lien, il doit continuer à tourner dans le même sens que le mouvement du corps comme le stipule la loi de la continuité.

Pour le second phénomène, la concordance de la rotation de la Terre autour d'elle-même avec la rotation du Soleil autour de lui-même - dans le sens ouest-est - s'explique par la même loi, car le morceau détaché d'un corps, doit continuer à tourner dans le même sens que le mouvement du corps lui-même.

Ce qui vaut pour le deuxième phénomène vaut également pour le troisième.
Dans le quatrième et le cinquième phénomènes la concordance des éléments et de leurs quotients dans le Soleil et la Terre, se justifie facilement par le fait que la Terre est une partie du Soleil et que les éléments de la "partie" d'un "tout" sont les mêmes que ceux du "tout".

En ce qui concerne le sixième phénomène, la concordance de la vitesse de la révolution de la Terre autour du Soleil et sa rotation autour d'elle-même, avec la vitesse de la rotation du Soleil autour de lui-même, tient au fait que les deux mouvements de la Terre tirent leur origine du mouvement du Soleil.

Dans le septième phénomène, c'est la théorie de la séparation (de la Terre du Soleil) qui explique "la concordance de l'âge de la Terre avec celui du Soleil".

C'est également de cette théorie de la séparation que le huitième phénomène selon lequel la Terre était très chaude à sa naissance, tient son explication.

La troisième démarche: si l'on suppose que la théorie de la séparation de la Terre du Soleil est inexacte, on sera amené à penser qu'il est peu probable de retrouver tous ces phénomènes réunis. Car leur réunion dans ces conditions signifie la réunion d'une série de hasards sans lien compréhensible. Donc la probabilité de les voir tous réunis, tout en supposant l'inexactitude de la théorie en question, devient trop faible; car pour pouvoir expliquer tous les phénomènes soulignés, elle nécessite un grand nombre de suppositions.

Ainsi en ce qui concerne la concordance de la révolution de la Terre autour du Soleil avec la rotation du Soleil autour de lui-même (sens ouest-est), il faut supposer que la Terre était à l'origine un corps céleste, situé loin du Soleil (soit qu'elle fut créée indépendamment du Soleil, soit qu'elle fît partie d'un autre soleil avant d'en être séparée) et qu'elle s'en est approchée par la suite. Il faut supposer également que cette Terre ainsi lancée, fut entrée dans son orbite autour du Soleil, par un point situé à l'ouest de celui-ci; et c'est ce qui expliquerait son mouvement dans le sens ouest-est, c'est à dire dans le même sens de la rotation du Soleil autour de lui-même. Autrement, si elle était entrée dans cette orbite par un point situé à l'est, elle aurait tourné dans le sens contraire (est-ouest).

En ce qui concerne la concordance de la rotation de la Terre autour d'elle-même avec celle du Soleil autour de lui-même (sens ouest-est), nous pouvons supposer par exemple que l'autre soleil dont la Terre serait issue, tournait d'est en ouest. Pour justifier la révolution de la Terre autour du Soleil dans une orbite parallèle à l'équateur solaire, nous pouvons supposer là également, que "l'autre soleil" dont la Terre serait originaire, était situé dans un point perpendiculaire à l'équateur de notre Soleil.

Quant à la concordance des éléments et de leurs quotients dans la Terre et le Soleil, nous devons supposer que la Terre - ou "l'autre soleil" dont elle se serait séparée - contenait les mêmes éléments - et dans des proportions identiques - que nous retrouvons sur notre Soleil.

Quant à la concordance de la vitesse de la révolution de la Terre autour du Soleil et sa rotation sur elle-même avec celle de la rotation du Soleil sur lui-même, nous pouvons supposer, toujours à titre d'exemple, que cet "autre soleil" dont il est question, avait explosé de façon à donner à notre Terre la vitesse qui concorde avec le mouvement du Soleil.

Enfin, pour ce qui concerne la concordance de l'âge respectif de la Terre et du Soleil avec la chaleur de la Terre à sa naissance, nous pouvons supposer que la Terre ait été séparé d'un autre soleil qui eût le même âge que notre Soleil et que cette séparation fût produite de telle sorte qu'elle ait provoqué en elle un très haut degré de chaleur.

Comme nous venons de le voir, pour justifier l'ensemble des phénomènes observés, il faut admettre, si l'on suppose fausse l'hypothèse de la séparation, la présence d'une série de hasards dont la réunion est trop peu probable. En revanche l'hypothèse, en la supposant exacte, suffit à expliquer tous les phénomènes et à les relier les uns aux autres.

Dans la quatrième démarche nous raisonnons comme suit: étant donné que l'existence de tous ces phénomènes observés dans la Terre est trop peu probable si l'on suppose que la Terre ne s'était pas séparée du Soleil. Or ces phénomènes existent effectivement; donc il est probable que la Terre s'était séparée du Soleil.

Dans la cinquième démarche nous établissons un lien entre la forte probabilité (celle de la séparation de la Terre de notre Soleil) que nous avons choisie dans la quatrième démarche, et la faible probabilité (celle de retrouver tous les phénomènes réunis dans la Terre sans admettre la séparation de celle-ci de notre Soleil) que nous avons émise dans la troisième démarche.

En reliant ces deux démarches, nous pouvons conclure que plus la faiblesse de la probabilité énoncée dans la troisième démarche s'accentue, plus la plausibilité de la forte probabilité établie dans la quatrième démarche augmente.

C'est en partant de ces faits que nous pouvons démontrer la théorie de la séparation de la Terre et du Soleil, et c'est par cette méthode que les savants en ont acquis la conviction absolue.