La femme dans la religion musulmane
Parmi les peuples et les nations du passé, nombreuses furent les croyances méprisantes à l’encontre des femmes, fondées sur le préjugé que la femme ne serait pas tout à fait un être humain, que son statut se situerait entre l’homme et l’animal, qu’elle manquerait de raison ou encore qu’elle ne serait pas digne de rentrer au Paradis, et d’autres propos fantaisistes et mensongers.
Ces croyances et idées, dans la mesure où elles ne dépassent pas les limites d’une évaluation de la femme, n’ont pas d’impact psychologique excepté autre que le sentiment d’orgueil chez l’homme et celui de l’humiliation chez la femme.
Ces sortes de préjugés sont répandues encore parmi tous les peuples, même quand leurs lois proclament haut et fort l’égalité des sexes. Il existe aussi des musulmans sincères qui nourrissent inconsciemment ce genre de sentiment négatif.
Il est donc nécessaire de leur rappeler qu’en islam, la femme est considérée sur un même plan d’égalité que l’homme. En maints versets, le Coran lui reconnaît les mêmes capacités et aptitudes pour gravir les échelons qui mènent vers la perfection.
Nous lisons dans la sourate Al-Ahzâb (Les coalisés), 33 : 35 : « Les Musulmans et Musulmanes, croyants et croyantes, obéissants et obéissantes, loyaux et loyales, endurants et endurantes, craignants et craignantes, donneurs et donneuses d'aumônes, jeûnants et jeûnantes, gardiens de leur chasteté et gardiennes, invocateurs souvent d'Allah et invocatrices : Allah a préparé pour eux un pardon et une énorme récompense. » (1)
On voit bien que dans ce verset, Dieu mentionne à dessein les qualités, devoirs et responsabilités des hommes en précisant qu’ils sont aussi les mêmes que ceux des femmes.
Ce verset nous laisse comprendre que pour Dieu, la masculinité ne constitue pas un critère de supériorité. Cette dernière, si elle doit avoir un sens, ne se fonde que sur la qualité de l’obéissance aux commandements divins.
Le Coran dit : « Aux croyants et aux croyantes, Allah a promis des Jardins sous lesquels coulent les ruisseaux, pour qu'ils y demeurent éternellement, et des demeures excellentes, aux jardins d'Eden [du séjour permanent]. Et la satisfaction d'Allah est plus grande encore, et c'est là l'énorme succès. » (Sourate Al-Tawba (Le repentir) ; 9 : 72).
Dans ce verset, Dieu définit la récompense promise comme étant la même pour l’homme et pour la femme, sans y inclure aucune distinction ni différence. Ce qui encore une fois suggère que l’homme ne jouit d’aucune supériorité du seul fait de sa masculinité. S’il en allait autrement, Dieu n’aurait pas défini une même récompense pour les deux.
Toujours dans le Coran, nous pouvons lire :
« Leur Seigneur les a alors exaucés (disant) : “ En vérité, Je ne laisse pas perdre le bien que quiconque parmi vous a fait, homme ou femme, car vous êtes les uns des autres… » (Sourate A^l ‘Imrân (La famille de 'Imrân) ; 3 : 195)
Dans ce verset, Dieu évoque les actions des hommes et des femmes en tant que sources de succès et de victoire, et en tant que véritables critères du jugement pour les départager. L’homme et la femme font partie du même genre humain et dépendent étroitement l’un de l’autre, seul l’action peut déterminer leur mérite. Pour le reste, la dépendance de l’homme à l’égard de la femme est de même proportion que la dépendance de la femme envers l’homme.
Le Coran évoque la vie excellente (hayâtan tayyiba) promise aux croyants, et ne manque pas non plus de préciser que cette splendeur est destinée aussi bien aux hommes qu’aux femmes, en toute égalité.
« Quiconque, homme ou femme, fait une bonne œuvre tout en étant croyant, Nous lui ferons vivre une bonne vie. Et Nous les récompenserons, certes, en fonction des meilleures de leurs actions. » (Sourate Al-Nahl (L'abeille) ; 16 : 97)
Et ailleurs, le Coran dit :
« Et quiconque, homme ou femme, fait de bonnes œuvres, tout en étant croyant... les voilà ceux qui entreront au Paradis; et on ne leur fera aucune injustice, fût-ce d'un creux de noyau de datte. » (Sourate Al-Nisâ' (Les femmes) ; 4 : 124)
Ici aussi, comme auparavant, il est fait mention des actions de l’homme et de la femme ainsi que des récompenses qu’elles appellent. Ce qui nous permet d’insister sur le fait que jamais l’islam ne recèle le moindre préjugé ni la moindre injustice à l’égard de la femme en tant que telle. Bien au contraire, il exprime le même respect pour la personnalité féminine que pour la personnalité masculine. Des dizaines d’autres versets coraniques s’adressent aux hommes et aux femmes avec le même message, sans discrimination aucune, et nulle part dans le Coran, il n’est fait cas d’un privilège quelconque accordé gratuitement et exclusivement à l’homme.
Dans un certain nombre de versets, la femme est présentée comme une source de tranquillité pour l’homme, de même qu’y est évoqué l’amour et la bonté réciproque, entre l’homme et la femme.
A ce sujet, le Coran dit :
« Et parmi Ses signes Il a créé de vous, pour vous, des épouses pour que vous viviez en tranquillité avec elles et Il a mis entre vous de l'affection et de la bonté. Il y a en cela des preuves pour des gens qui réfléchissent. » (Sourate Al-Rûm (Les romains), 29 : 21).
Il ressort de ces versets que le Coran accorde la même importance à l’homme qu’à la femme. Les deux éléments du genre humain sont récompensés exclusivement sur la base de la qualité de leur foi et de leurs actions. Nulle part, il n’a amoindri l’importance de la femme, ni entamé son rang.
On lit en effet aussi :
« Elles sont pour vous [comme] un vêtement, et vous êtes pour elles [comme] un vêtement… » (Sourate Al-Baqara (La vache) ; 2 : 187).
Ce verset met en lumière la dépendance mutuelle de l’homme et de la femme. Il met fin d’un trait de plume à l’absence d’autonomie chez la femme, idée colportée par certains qui voudraient présenter la femme comme tributaire de l’homme, sans admettre que l’inverse est vrai aussi.
Les versets que nous avons cités ici, et qui peuvent être consultés dans le texte arabe ou dans les traductions fidèles dans toutes les langues, témoignent de la puissance du Coran à définir sans ambigüité aucune et par des versets aussi clairs, le statut de la femme dans l’islam. Ces versets constituent à eux seuls toute une charte des droits et devoirs de la femme.
En dépit de leurs bonnes intentions, les institutions chargées de légiférer dans les pays du monde ont produit beaucoup de textes pour garantir l’égalité des droits de la femme, mais elles se sont toutes fourvoyées dans une notion d’égalité d’apparence, laissant l’image de la femme se dégrader, et la transformant en un simple objet de désir de l’homme. La seule égalité qui compte, celle de la dignité de la personne, a été délaissée. Elle qui pouvait être l’inspiratrice de la grandeur, se voit aujourd'hui loin de l'image de la Dame au service de laquelle tant de chevaliers se dévouèrent.
Beaucoup de femmes occidentales se voient sous-estimées, voire humiliées, à cause de cette image que donnent d'elles les affiches publicitaires qui les présentent comme de simples incitatrices à la consommation des produits. Le symbolisme spirituel qui devait être celui de la femme a été malheureusement dépouillé de sa puissance.
La femme dans la religion musulmane
La sacralisation du célibat et l’abstinence sexuelle est sans aucun doute un autre préjugé avilissant envers les femmes. Comme nous le savons, pour certaines religions, la relation entre les deux sexes est par essence une souillure, même dans le cadre de la Loi divine. Pour les fidèles de ces religions, l’accession aux degrés élevés de la spiritualité est ouverte aux seules personnes ayant observé le célibat toute leur vie. L’un des leaders connus de cette religion a dit : « Il faut déraciner l’arbre du mariage avec la pioche de la virginité ».
Les mêmes chefs religieux ne permettent le mariage que sur la base du principe du moindre mal : entre deux maux choisir le moindre. Comme la majorité des hommes sont incapables de s’imposer la règle du célibat, et qu’ils risquent à tout moment de sombrer dans la licence et de fréquenter de nombreuses femmes, ces autorités religieuses ont jugé préférable de les autoriser à épouser une femme.
La racine de l’idéal du célibat et de l’abstinence sexuelle se trouve dans le mépris de la femme et sa déconsidération : éprouver de l’amour pour une femme est un vice moral à leurs yeux.
L’islam a fait une guerre soutenue à ces absurdités et ces légendes. Il a sacralisé le mariage et déconsidéré le célibat comme valeur sociale. Aimer les femmes est une des qualités morales des prophètes divins. Comme pour rappeler la place de la Beauté dans la spiritualité islamique, le Prophète a dit : « On m’a fait aimer trois choses de votre monde : le parfum, les femmes et la prière ».
Il va sans dire pour tout croyant que la bien-aimée ne pourra être un objet des sens pour l’envoyé de Dieu (s). Le but du noble Prophète (s) est ici de mettre en évidence l’aspect profondément spirituel de la femme dans une société où la naissance d’une fille était considérée comme une malédiction. C’est ainsi que le Croyant comprend pourquoi, le Prophète (s) a affirmé que plus la foi d’un homme augmentait, plus son amour de la femme augmentait.
Bertrand Russel a dit que chez tous les prophètes tels qu'ils sont présentés dans les autres religions, il existe une sorte de misogynie, excepté dans l’islam. Dans l’intérêt de la communauté, l’islam a fixé des normes et des règles à la relation entre les hommes et les femmes, sans considérer cette relation comme une souillure.
Le célibat et l’abstinence sexuelle
Un autre préjugé courant au sujet des femmes est celui de penser qu’elles ont été créées pour l’homme. Jamais l’islam n’a tenu et ne tiendra un tel propos. Car sous ce rapport, ils seront tous les deux, l’homme et la femme, comparables à l’animal.
L’islam exprime d’une façon on ne peut plus claire, les cas où peut s’entendre le principe de la cause finale.
La terre, le ciel, les nuages, le vent, les végétaux, les animaux, toutes ces choses ont été créées pour le genre humain (homme et femme), pour qu’elles fassent partie de son cadre de vie et d’existence. Le Coran dit que l’homme et la femme ont été créés chacun l’un pour l’autre. « Elle sont un vêtement pour vous et vous êtes un vêtement pour elles. » (Sourate Al-Baqara (La vache) ; 2 : 187).
Si le Coran avait considéré que la femme a été créée pour l’homme, il en aurait forcément tenu compte dans les lois qu’il prescrit en précisant davantage ce que cela implique. Mais comme l’islam, dans son interprétation de la création, n’accorde aucun crédit à cette sorte d’idée, cet aspect n’a jamais été intégré dans les décrets concernant l’homme et la femme.
La femme a une importance spirituelle profonde, non seulement de par son rôle de mère-créatrice, mais également parce qu’elle peut être la manifestation de l’attribut de Beauté pour celui qui médite les signes de Dieu. D’autre part, elle est responsable de ses actes devant Dieu au même titre que l’homme. Elle est sujette aux mêmes devoirs envers Dieu et la religion, et espère la même récompense que l’homme. Elle est justiciable devant Dieu en toute liberté, sans pouvoir tirer prétexte de sa féminité. Car :
« Dieu n’impose à une âme que selon sa capacité. En sa faveur ce qu’elle aura acquis, à sa charge ce qu’elle aura commis. » (Sourate Al-Baqara (La vache) ; 2 : 286)
Rûmî, qui est un grand penseur islamique avant d’être un poète mystique, expose une vision positive de la femme. Il laisse voir que c’est l’âme qui compte, la féminité et la masculinité n’étant que des accidents (‘awâriz) de l’âme qui est en Elle-même plus élevée que la sexualité.
... Ruh râ bâ mard o zan eshrâk nist
Az mo’annath v-az mozakkar behtar ast …
... l’esprit ne dépend pas de la masculinité ou de la féminité
Il est au-dessus des genres mâle et femelle
(Mathnawî Ma’nawî ; Cahier 1 : vers 1975 et 1976)
Un autre point de vue erroné au sujet de la femme qui eut cours en son temps était de voir en la femme un mal inévitable. Beaucoup d’hommes ne cessent de montrer un comportement humiliant à l’égard des femmes, voyant en elles la source de toutes leurs infortunes, en dépit des bienfaits dont ils bénéficient auprès d’elles. Ils se permettent même de l’associer à l’infidélité et à l’ingratitude.
L'islam valorise considérablement la fille et la femme, et le Saint Coran met l’accent spécialement sur ce point que l’existence de la femme est bénéfique pour l’homme. Elle est pour lui la source de tranquillité et de paix du cœur.
Enfin, le Coran a mis fin à un autre mensonge au sujet des femmes selon lequel le rôle qui leur reviendrait dans la conception de l’enfant serait inférieur à celui de l’homme et que par conséquent, elles ne feraient que porter l’enfant de leur mari, comme un simple réceptacle dans lequel grandirait l’enfant avant de venir au monde et d’appartenir à son père.
Dans plusieurs versets, il est clairement déclaré que nous avons été créés à partir d’un homme et d’une femme. D’autres versets sur ce sujet ont été commentés par les exégètes. Le Coran a donc mis fin à ce genre de faux débat.
Il ressort de ce qui précède que d'un point de vue philosophique aussi bien que selon l’interprétation de la création, l’islam n’a jamais eu un regard de mépris envers la femme ; loin de là, il a même réfuté et combattu énergiquement ces idées. Ce qu’il conseille est de lutter contre ses penchants charnels et de garder l’équilibre dans la vie d’une façon générale, et ce qu’il rejette est que la femme soit transformée en objet d’attraction et soit réduite à sa dimension corporelle.
Gâhi nehad dar tab’e to sowdâ-ye sîm o zarr o zan
Gâhi nehad dar jân-e to Nur-e khiyâl-e Mostafâ
Tantôt, il suscite en toi la passion de l’argent, de l’or et des femmes
Tantôt, il dépose dans ton âme la lumière de l’image de Mustafâ (s)
(Divân Shams, Ghazal 3 : vers 8)
Il ne considère pas la femme comme un symbole de l’instinct, du désir humain, celle qui peut être un élément pour dévier, éloigner de Dieu et de la Vérité ; son rôle est au contraire de mener l’homme vers la Perfection du Prophète (s).
Ce n’est pas la femme en tant que telle qui est visée par la critique, mais l’image fausse et trompeuse qu’elle donne à l’homme. En tant que tentation, la femme est aussi dangereuse pour l’homme que ce dernier l’est pour elle !
En revanche, les deux ont la possibilité de promouvoir. Pour Rûmî comme pour Ibn 'Arabî, la femme peut accéder à tous les degrés de réalisation spirituelle. Si la femme peut être source d’épreuve périlleuse pour l’homme, la féminité, telle qu’elle est interprétée par Rûmî, est bien autre chose.
La Femme est le rayon de la Lumière Divine
Ce n’est point l’être que le désir des sens a pour objet.
Elle est Créateur, faudrait-il dire ?
Ce n’est pas une Créature. (2)
Il nous reste à voir maintenant quelle est la philosophie qui sous-tend l’absence d’homogénéité entre les droits de la femme et ceux de l’homme.
back to 1 Nous avons suivi ici la traduction de M. Hamidollah plus proche du texte coranique.
back to 2 Traduction de Henry Corbin
Références :
Motaharî, Mortezâ, Nezâm-e hoquq-e zan dar eslâm (Le système des droits de la femme dans l’islam), pp. 146-152 ; Zibâyi Nejâd, Mohammad Rezâ ; Sobhânî, Mohammad Taqî, Darâmadi bar Nezâm-e shakhsiyat-e zan dar eslâm (Introduction au système du statut de la femme dans l’islam).